lundi 2 juin 2025

Salle de la reddition à Reims : la mémoire des traces – Chronique du 3 juin (1)

Bonjour-bonjour

 

On annonce aujourd’hui la mort à 93 ans de Pierre Nora qui était surtout connu pour être le maître d’œuvre des Lieux de mémoire, ces lieux qui, par la force de la volonté humaine ou le travail du temps, sont devenus un élément symbolique du patrimoine commémoratif de la communauté française. Considérés aujourd’hui comme liés principalement à la déportation et aux faits de la guerre 39-45, on peut aussi y ajouter ces champ de bataille encore visibles aujourd’hui, où encore ces lieux où se retrouve le souvenir d’anciennes pratiques, tels que les places de Marché ou le tracé de fortifications – sans oublier (pourquoi pas ?) les héros dont on conserve la tombe.

Souvenir, lieux mémoriels, autant de façon de dire que la mémoire des traces, celle qui est liée aux évènements eux-mêmes est dotée d’un fort potentiel émotionnel. C’est ainsi que le livre récent de Sylvain Tesson, intitulé Les piliers de la mer évoque l’escalade entreprise tout autour du monde de ces « Stack », terme qui désigne en anglais les piliers de la mer, détachés de la côte. « Autour du monde, ces sentinelles de roche se dressent par milliers devant les falaises côtières. »

 


L’un des stack le plus connu en France, celui de l’aiguille d’Étretat, illustre parfaitement ces lieux qui portent la trace de l’état passé de la côte.

 

- On a beaucoup discuté l’entreprise de Pierre Nora qui a débouché sur le « devoir de mémoire » instituant une obligation de conserver cette « mémoire des traces » - sans doute en espérant que cette mémoire permettait d’activer l’autre, celle des récits et du « narratif » pour parler comme aujourd’hui. 

Mais quelle différence ? Si les lieux de mémoire de Pierre Nora sont des lieux authentiques, on ne compte plus aujourd’hui les « Mémorials » entièrement neufs dont la seule réalité est de faire écho à des évènements dont on veut réactiver le souvenir.

D’ailleurs, la distinction entre le « lieu » et le « narratif » est un peu artificielle. Les lieux n’ont de réalité que pour autant qu’ils sont imprégnés de l’histoire qu’ils portent. Par exemple, la « salle de la reddition » à Reims où a été signée la capitulation allemande le 7 mai 1945 (demain 80 ans) n’est un lieu porteur d’émotion que pour autant qu’on possède déjà le récit de l’évènement qui y eut lieu.

Or, à part l’émotion, je ne vois pas sur quoi porterait le devoir de mémoire.

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