dimanche 27 avril 2025

Le pire pour éviter le « pire du pire » - Chronique du 28 avril

Bonjour-bonjour

 

Vous qui êtes au fin fond d’un désert médical, rassurez-vous. Désormais vous pourrez consulter un médecin deux jours par mois. A vous de faire preuve de bonne volonté en n’étant malade que ces jours-là.

C’est le sens de l’annonce faite par le Premier ministre « Chaque médecin généraliste ou spécialiste qui exerce dans un territoire bien pourvu devra consacrer un ou deux jours par mois à des consultations dans les zones qui sont les plus en difficulté »

L’article consulté précise en effet : « Alors que 6 millions de Français n’avaient pas de médecin traitant en 2024, l’exécutif veut imposer à tous les médecins jusqu’à deux jours de consultation par mois dans les zones prioritaires du territoire. »

Cette mesure dont on devine qu’elle sera mal accueillie par les jeunes praticiens soucieux de préserver leur liberté d’installation, est justifiée par l’exécutif au nom d’un « principe de solidarité » du corps médical comme une alternative à la « fin de la liberté d’installation » des médecins dont la menace ne cesse de planer sur la réduction des déserts médicaux.

- Moi, quand j’entends le mot « solidarité » je cours à l’abri le plus proche. Car enfin, comment ne pas voir la limitation autoritaire au droit de choisir librement son lieu d’implantation dès lors qu’on a le devoir de s’installer deux jours par mois (du moins tel que promis, aujourd’hui) dans un lieu prédéfini ?

Qu’on me permette d’évoquer un cas personnel. Il s’agit de la 1ère nomination des jeunes profs de philosophie en début de carrière – en particulier ceux qui venaient de la région parisienne, particulièrement nombreux dans cette discipline. Comment vivre une existence simplement normale lorsqu’on est obligé de quitter ses parents, ses amis, les lieux où l’on a installé sa vie, dès lors qu’il faut partir à plusieurs centaines de kilomètres ? Certains conservaient leur logement, mais faisaient la navette en train : on les appelait les « turbo-profs » - je suppose qu’aujourd’hui on choisirait la dénomination de « prof-TGV ». Ils avaient deux vies, l’une faite de leur vie familiale et personnelle ; l’autre d’un turbin concentré sur quelques jours et vécu comme une aliénation dans un monde irréel et inconnu. Quant aux malheureux issus du sud de la France et régulièrement nommés dans le nord, c’était le déracinement total, assorti de la rupture irrémédiable avec la compagne ou le compagnon.

Alors, voilà : c’est cette vie-là que vous allez proposer à des gens qui ont fait 8 années d’études à fort intensité et qui plus est sont possesseurs d’une arme absolue : celle de la rareté.

Concluez vous-mêmes.

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