samedi 6 septembre 2025

L’ennui de Don Juan – Chronique du 7 septembre

Bonjour-bonjour

 

Les français s’ennuient. Et cela se voit là où ça ne devrait jamais apparaitre : au lit, quand se retrouve le couple. 

--> À l'occasion de la Journée Mondiale de la Santé Sexuelle du 4 septembre, l'Ifop a réalisé une enquête auprès de 1 300 Français(es). Il s’agit d’une étude destinée à faire le point sur leur moral quant à leur vie affective et sexuelle : « La proportion de femmes avouant s'ennuyer lors de leurs ébats a explosé, passant de 36% en 1996 à 56% en 2025, soit plus d'une sur deux désormais et 26% trouvent leur sexualité "routinière". De manière générale, les femmes jeunes (moins de 45 ans) souffrent plus de cet ennui que les plus âgées. »  –  on se doute que le ressenti des hommes est à peu près le même. 

On voudrait croire à une perte de libido, et à sa conséquence : la frustration sexuelle. Les un(e)s n’ont plus envie, tandis que les autres sentent que leur désir n’est plus pris en compte. D’une manière comme d’une autre, c’est au lit que le problème prendrait naissance. Il suffirait d’éviter les rapports trop "plan-plan" : 36% des personnes en couple reconnaissent ne pas faire suffisamment d'efforts pour pimenter leur intimité, un chiffre deux fois plus élevé qu'il y a trente ans (17% en 1997). (art. cité)

Les couples ne cherchent plus à innover et la monotonie gagne du terrain de plus en plus tôt : des efforts pour « libertiner » la sexualité devraient être faits.


 


Mais c’est justement là qu’est l’erreur : c’est en amont que le problème se pose. 

« le manque de plaisir ne se résout pas seulement par des positions nouvelles, mais par la qualité du lien. Plus le couple cultive des moments agréables et complices au quotidien, plus l'intimité redevient vivante. Le désir naît d'abord de l'attention portée à l'autre, pas seulement de ce qui se passe dans la chambre. » (art. cité)

- Ici, que dit le philosophe ? Qu’il n’est ni psychiatre ni sexologue et que sa spécialité laisse la libido aux spécialistes ? En réalité, si Freud a intéressé les philosophes, c’est parce qu’il a révélé toute une part de la vie humaine qui avait jusque-là été écartée de leurs analyses. La sexualité n’est pas un îlot séparé du continent de l’âme dont la présence ne jouerait aucun rôle dans la vie des êtres humains. - Eh bien, voilà, que cette étude sur l’ennui nous invite à faire le voyage sexualité-vie humaine dans le sens inverse : non seulement mes pensées sont influencées par ma sexualité, mais réciproquement celle-ci subit les malheurs qui affectent celle-là. Supposez que vous ayez usé les liens qui vous unissaient à votre compagne/compagnon. Comment voulez-vous avoir quelque complicité avec lui/elle ? Et comment avoir de plus fortes émotions sexuelles – dans la mesure où celles-ci demandent d’inventer à deux une aventure amoureuse nouvelle ? Les liens quotidiens ayant usé la révélation de la nouveauté, en inventer d’autres est devenu trop fatiguant - mieux vaut en chercher de nouveaux ailleurs. Mais ce palliatif ne durera pas : Don Juan est un perpétuel insatisfait.

Et si « approfondir le lien », cela signifiait savoir trouver de nouvelles sensations dans de nouvelles situations ? Si on prenait désormais son pied en écoutant ensemble ce diable de don Juan susurrant « La cidarem la mano » ? (par exemple ici)

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