Bonjour-bonjour
Il n’y a pas que Napoléon dans les mémoires. Il y a la Commune de Paris aussi, puisque depuis le 18 mars la mairie de Paris célèbre les 150 ans de la Commune. Occasion d’entendre l’Internationale d’Eugène Pottier, composée à Paris en juin 1871 en pleine insurrection ; et qui depuis retentit à chaque fois que le peuple s’est soulevé contre ses oppresseurs.
« A chaque fois » ? Sûrement pas, car si en mai 68 l’Internationale était l’hymne des manifestants, depuis les épisodes des Gilets Jaunes, c’est plutôt la Marseillaise qui a retenti.
Étonnant changement, pour des gens également déterminés et également en lutte contre la brutalité du pouvoir : comment l’expliquer ?
- On peut comprendre déjà que l’Internationale, chant révolutionnaire, n’allait pas avec les revendications des Gilets : eux ce qu’ils voulaient c’était de la thune et rien d’autre. Pour cela, changer les hommes oui ; changer la nature du pouvoir non. Pourtant, à l’instar des communards, quelques-uns d’entre eux demandaient la démocratie directe donnant le pouvoir référendaire au peuple ; mais il s’agissait là d’une petite minorité fortement idéologisées, et à part eux personne ne voulait autre chose que la démission du gouvernement et de nouvelles élections.
Reste qu’on peut malgré tout s’étonner de l’omniprésence de la Marseillaise, chantée comme un mantra par les manifestants à chaque fois qu’il fallait défier les policiers ou quelque autorité légale. Par un curieux reversement, la Marseillaise rejetée par les manifestants de 68 comme hymne officiel d'un pouvoir despotique, est devenue, le temps des manifestations des Gilets Jaunes, la preuve de leur légitimité ; pour eux, chanter la marseillaise c’est dire : « C’est nous le peuple, et c’est à nous de dire la loi ! »
- On dégage ainsi une loi générale : jamais la Marseillaise et l’Internationale n’ont été chantées ensemble.
Pourtant il y a tout pour les réunir, à commencer par la nature des opprimés : ce sont dans les deux cas les pauvres écrasés par la misère et par des lois iniques. Dans les deux cas ils n’ont que des haillons pour les protéger, et que des sabots pour marcher. Dans les deux cas ce sont les femmes, opprimées parmi les opprimés qui lèvent d’étendard de la révolte :
J’ai bien essayé de fusionner ces deux hymnes, et ça a donné ça : Allons ! Enfants de la Patrie ! / Vous, les damnés de la terre / Vous les forçats de la faim / Entendez-vous dans les campagnes / Mugir ces féroces soldats ? / Le monde va changer de base : / Nous ne sommes rien, soyons tout !
C’est nul, évidemment ; déjà parce qu’on passe sans prévenir du « Vous » au « Nous » : si Rouget de l’Isle interpelle les citoyens en s’adressant à eux, Eugène Pottier se place au cœur de la classe des opprimés. Et puis surtout, si les uns sont en lutte contre un envahisseur étranger, les autres se soulèvent contre le pouvoir de leur propre pays.
Mais de toute façon, à quoi bon chercher à réunir ce qui l’est déjà ? Oui, chacun de ces hymne a déjà été accaparé par un pouvoir despotique, oubliant le sens évident des paroles, délaissées au profit de la simple musique sur la quelle défilent les chars d’assauts aux Champs-Élysées et les troupes au pas de l’oie sur la Place Rouge.
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