mercredi 16 mars 2022

Devrons-nous apprendre à parler corse ? – Chronique du 17 mars

Bonjour-bonjour

 A peine a-t-on parlé d’autonomie en Corse qu'un débat enfiévré s’est rallumé : en quoi une telle autonomie peut-elle consister ? Jusqu’où doit-on céder aux corses pour reconnaitre leur qualité de peuple autonome ? Et quelle ligne rouge ne doit-on pas franchir sous peine de renoncer à une partie du territoire français, chose absolument défendue par le Constitution ?

 

Les philosophes n’ont certes pas la compétence pour entrer dans ce débat qui suppose une spécialisation que seuls les constitutionnalistes possèdent. Toutefois, la souveraineté politique est un concept qui est depuis longtemps dans le champs de la réflexion en philosophie politique ; je n’en veux pour preuve que l’existence des œuvres de Bodin (1529-1596) et de Montesquieu (1689-1755). Ces auteurs auraient-ils des réponses à apporter pour éclairer l’idée d’autonomie régionale ?

 

Selon Bodin, la souveraineté est caractérisée comme une puissance continue, absolue et surtout indivisible ; qu’on délègue ce pouvoir – par exemple à une assemblée – et alors, ou bien il passe tout entier du côté de celle-ci ; ou bien il reste entre les mains du souverain, le quel peut dissoudre cette assemblée d’élus. L’autonomie corse signifierait que leur assemblée doit pouvoir statuer en toute légitimité et en toute indépendance sans craindre que Paris ne vienne casser ses choix : il faut donc que ce pouvoir soit divisé : une partie à la République française, et une autre au Pays corse – mais dans ce cas la Corse ne deviendrait-elle pas une nation indépendante, séparée de la France, ce qui comme on vient de le dire est interdit par la Constitution ?


Reste donc à délimiter différents domaines dans cette souveraineté, comme l’ont fait la plupart des États fédéraux. On ne discutera pas ici de leur domaine de compétence, rappelant simplement que Montesquieu en concevait trois : le législatif, l’exécutif et le judiciaire. Pour éviter les abus du pouvoir, il faut disait-il le fragmenter, non pas pour l’affaiblir, mais pour qu’il s’auto-limite. Quand on voit aujourd’hui quels problèmes soulève la confusion entre le pouvoir exécutif (celui du Président) et le pouvoir législatif (celui du parti du Président) on voit combien il avait raison.

Mais la question du statut de la Corse doit être tranchée par un autre type de division de souveraineté : aux corses les lois qui ne concernent que la Corse ; à Paris les lois qui concernent tous les français.


- Sans doute : reste quand même à savoir quel serait le périmètre de ce domaine national. 

Par exemple, les Corses veulent que leur langue soit reconnue langue nationale comme en Belgique pour le flamand et la wallon. Leur autonomie peut-elle aller jusque-là ?

La question n'est pas encore tranchée, mais on voit bien que si l'autonomie de la Corse ne va pas jusque là, alors elle n'existe même pas.

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