Bonjour-bonjour
Les manuscrits volés de Louis-Ferdinand Céline ont été retrouvés en 2019 et remis à la justice avant d’être, au mois d’août dernier – il y a juste 7 mois –restitués aux ayant-droits de l’écrivain. (1) Or, voici que la nouvelle vient de tomber : « les manuscrits de Louis-Ferdinand Céline retrouvés en 2021 donneront lieu en mai à la parution d'un inédit, Guerre, et à une exposition » (Lire ici)
Alors que la guerre fait rage en Europe, que l’épidémie de covid repart de plus belle et que les candidats à l’élection présidentielle s’affrontent pour un dernier round, voici que l’annonce d’une publication d’un roman perdu d’un écrivain antisémite et collaborationniste condense toute notre attention et nous enflamme...
Bizarre, direz-vous ? Peut-être, mais pas tant que ça : le pouvoir de la création, littéraire ou autre, est tel qu’il l’emporte sur toute autre émotion, et ce rendez-vous avec Céline, attendu plus de 75 ans, explique largement ce sursaut de passion.
Il faut dire aussi que cette publication à marche forcée (7 mois depuis la résurgence de ces manuscrits ont été suffisants pour les expertiser, les transcrire et en faire une édition définitive) coïncide avec un regain d’intérêt pour l’idéologie célinienne. Car, à l’heure où monsieur Zemmour s’efforce de rendre acceptable le gouvernement de Vichy, Céline revient sur le devant de la scène avec son antisémitisme et ses pamphlets (dont on se demande s’il faut les rééditer mais de toute façon ils l’ont déjà été et sont donc accessibles). Céline dont on rappelle que dans ses écrits de la période il fustigeait les ministres de Pétain pour leur mollesse ; lui, c’était « dans la rue avec une mitrailleuse et on tire dans de tas ».
Il y a quelques années le Ministère de la culture voulait célébrer je-ne-sais-plus quel jubilé célinien, et bon nombre d’intellectuels, tout en admettant la valeur de son œuvre, se sont mobilisés pour empêcher que cette reconnaissance soit donnée à un tel personnage. Le projet fut retiré et on n’en parla plus ; aujourd’hui la question ne réapparait pas et on peut donc penser qu’on a définitivement séparé deux domaines : l’un fait de la vie de Céline ; l’autre de son œuvre.
Ce qu’on fait pour Céline, faisons-le pour Roman Polanski.
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(1) On lira ici cette curieuse aventure qui débute en 1944, avec de la fuite de l’écrivain devant l’arrivée des forces de libération de la capitale.
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