lundi 21 juin 2021

Mauvaise foi électorale – Chronique du 22 juin

Bonjour-bonjour

 

Après les élections régionales la surprise est venue du chiffre historiquement élevé des abstentions. Et à chaque fois, c’est la même chose : les candidats déçus s’en prennent aux sondeurs qui n’auraient pas fait correctement leur travail ; le Rassemblement National quant à lui, est allé jusqu’à accuser le gouvernement d’avoir organisé ces défections.  

Les responsables des instituts de sondages évoquent une autre raison : les sondés ne répondraient pas avec sincérité quand on les interroge sur leurs intentions de participer ou non à l’élection. Ce phénomène est bien connu puisqu’il a été observé jadis pour expliquer les chiffres surprenants obtenus aux élections par le parti de Jean-Marie Le Pen. On disait alors que les électeurs du Front National refusaient de révéler leur préférence pour ce parti ; aujourd’hui ce serait donc le même phénomène concernant le refus de participer au scrutin. Mais dans un cas comme dans l’autre, on est surpris de constater que des personnes, dans l’anonymat des réponses au sondage, se sentent obligées de mentir comme si elles avaient honte – honte devant elles-mêmes puisque le sondeur ne les connait pas. 

- Ce mensonge à soi-même agit donc comme un procédé visant à me sortir du piège de la honte qui m’identifie à mes actes : je suis celui qui fuit sa responsabilité de citoyen, mais je refuse de me reconnaitre dans ce personnage et du coup je retrouve ma liberté. En effet, comme le montre Jean-Paul Sartre dans son analyse de la mauvaise foi (dans l’Être et le néant), ce refus de s’identifier à soi-même en étant à la fois le trompeur et le trompé n’est pas seulement la trace de la duplicité de la conscience, c’est aussi la preuve de la liberté humaine puisqu’en niant ma situation je me libère de cet engluement dans cet être que je suis pour les autres.

- Du point de vue social tout se passe comme si je disais : « Oui, je suis un bon citoyen et j’irai donc voter dimanche. » Et je serai sincère en disant cela. Mais dans le secret de ma conscience je penserai aussi « Mais je reste libre de ne pas y aller, parce que je ne suis pas une marionnette manipulée par les élites politiques ». L’avenir n’est pas écrit ; comme le dit la boutade : « Le pire n’est pas certain il n’est que probable. »

Et vous, dimanche prochain – vous allez voter ?

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(1) Dans l’Être et le néant.

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