jeudi 18 juin 2020

Si l’État est fort, il nous écrase. S’il est faible, nous périssons – Chronique du 19 juin

Bonjour-bonjour

 

 

Si l’État est fort, il nous écrase. S’il est faible, nous périssons : vous reconnaissez peut-être la formule de Paul Valéry, prise dans Regards sur le monde actuel. On comprend que l’État doit être dans l’équilibre entre l’exercice de la force (violence légitime) et en même temps que son pouvoir doit être limité de façon constitutionnelle (séparation des pouvoirs). Que l’État ait le pouvoir sans avoir tous les pouvoirs. Bref : débattre de cet équilibre a rempli des volumes entiers, de Hobbes à Rousseau ; et notre 20ème siècle féru de totalitarisme a encore enrichi les références. On sait que la 5ème République voulue par le Général de Gaulle a penché pour l’autorité de l’État qui avait été affaibli par le parlementarisme de la 4ème

- Mais ce n’est pas pour vous proposer un corrigé de dissertation de philo-politique que je reviens sur cette question. C’est plutôt que la période que nous venons de vivre nous montre une autre façon de croiser la force de l’État avec sa faiblesse : alors que d’innombrables citoyens de jaune vêtus allaient protestant contre la violence illégitime à travers des charges policières, les voici à présent réclamant le secours financier du même État, jugé trop avare dans le versement des prébendes allouées aux chômeurs du covid. À côté des coups de matraque, l’État se doit de déployer une puissance souveraine et tutélaire qui veille sur les citoyens comme un père attentif et généreux sur ses enfants. Les quels enfants quoiqu’affaiblis par la misère, restent forts pour réclamer à manger.

 

 

 

Constatons que nous ne sommes pas prêts à devenir anarchistes, et même les plus enragés des indépendantistes ont prudemment renoncé à leur combat contre l’État français pour réclamer simplement plus d’autonomie (la liberté avec les sous). Au lieu de mépriser une telle attitude, reconnaissons au contraire un mécanisme aussi vieux que celui de l’État. Rappelons-nous en effet notre lointain passé historique : les monarques d’Ancien régime étaient supposés apporter la prospérité à leur peuple en attirant la miraculeuse providence divine sur le royaume.

Aujourd’hui, nos monarques républicains ont une capacité extraordinaire : celle de trouver l’argent nécessaire pour gaver les pauvres citoyens affamés, et ne jamais rembourser la dette. Ça s’appelle « dette perpétuelle » et c’est un miracle laïque.

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