Bonjour-bonjour
Une émission de France culture aborde un phénomène largement méconnu : celui de l’incertitude devant l’avenir politique. Il faut dire que nous sommes envahis par des spécialistes qui ont la rhétorique nécessaire pour nous persuader qu’ils maitrisent la situation avec suffisamment de certitude pour en prédire l’évolution. Mais en réalité on reconnait les philosophes au fait qu’ils acceptent d’affronter l’incertitude où nous sommes devant cette évolution.
- Selon l’auteur de l’émission, le philosophe pensant l’avenir politique doit affronter l’incertitude de la pensée. Ainsi du philosophe Claude Lefort, qui s’oppose au surplomb des idées : "Il y a une distance (...), entre une philosophie politique de la raison, qui essayait de faire plier les événements aux catégories de la raison qu’ils avaient inventées par avance (...), et le travail de Lefort, c’est-à-dire qu’écrire à l’épreuve du politique, ça veut dire risquer constamment sa parole, l’engagement de sa parole, au contact d’événements qui ne cessent de nous déloger de nos certitudes politiques."
On retrouve cette exclamation de Kant (dans son article « Qu’est-ce que les lumières ») « Sapere aude ! », qu’on traduit par « Ose penser ! ». On songe assez platement qu’il s’agit simplement de dire qu’en mettant sa raison au service de sujets politiques on court de risque de déplaire au Prince. Certes – mais plus fortement, il s’agit aussi de sujets pour les quels on doit, en tant qu’individus prendre la responsabilité d’une conclusion que le recours à la raison ne suffit pas à confirmer. En démontrant un théorème je ne prends aucune responsabilité, parce que n'importe qui faisant la même démarche arriverait au même résultat. Mais en prévoyant l’évolution d’un régime précis, existant dans un pays donné, vers une démocratie ou au contraire vers le despotisme, je prends le risque de me tromper, erreur qu’on ne peut absolument éviter parce qu’aucun modèle ne vient diriger la pensée. Même la science n’échappe pas à cette incertitude : l’évolution du climat qui n’obéit pas tout à fait aux prévisions pâtit du fait qu’il n’y a pas d’autres planètes où les phénomènes climatiques de la Terre seraient testables.
J’aimerais aussi que cette incertitude devant l’avenir résulte simplement du fait que l’avenir n’est pas connaissable parce qu’il n’est pas encore écrit.
Et si penser l’avenir c’était aussi (tenter de) le créer ? On sait bien que ça ne suffit pas, mais on voudrait quand même que ce soit un tout petit peu possible.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire