vendredi 10 juillet 2020

Spécial prise de tête – Chronique du 11 juillet

Bonjour-bonjour

 

J’hésite encore à vous entretenir de mes songeries de ce matin, tant elles sont éloignées des préoccupations quotidiennes. Mais après tout cela, ne dérangera que ceux qui liront des lignes, c’est-à-dire pas grand monde.

Alors voilà : si la physique quantique retient l’attention du grand public, c’est parce qu’elle met notre monde habituel en concurrence avec un monde dans lequel plein de choses inimaginables ailleurs se produisent. On a retenu l'exemple la superposition d’état avec le chat de Schrödinger ; mais il y a aussi l’intrication des particules, dont on parle souvent en raison de son rôle dans la création de l’ordinateur quantique dont tout le monde rêve. C’est ce dernier point qui me fait réagir.

Définissons : « En mécanique quantique, l'intrication quantique, ou enchevêtrement quantique, est un phénomène dans lequel deux particules (ou groupes de particules) forment un système lié, et présentent des états quantiques dépendant l'un de l'autre quelle que soit la distance qui les sépare. » Art. Wiki

- On ne peut comprendre ce phénomène qu’à la condition de supposer les deux particules comme étant mystérieusement liées à travers l’espace, celui-ci ne modifiant en rien leur relation. Quand je dis « mystérieusement » c’est sans doute parce que je ne suis pas un véritable scientifique. Car pour qu’il y ait du mystère, il faut qu’il y ait tentative d’explication. Le savant quant à lui ne cherche pas d’abord à expliquer mais à constater. L’explication viendra ensuite mais seulement dans le cadre de la démarche scientifique. Rappelez-vous Newton affirmant « Hypotheses non fingo » (1) pour écarter les hypothèses seulement logiques pour expliquer les phénomènes de la gravité.

Seulement voilà : nous qui sommes plus philosophes que physiciens, nous laissons à notre esprit le droit de vagabonder à la recherche d’analogies fonctionnant dans notre monde. Où trouverons-nous un équivalent de l’intrication quantique ? Un phénomène impliquant une communication instantanée entre deux êtres, au point qu’on devrait dire que, même séparés, ils n’en forment qu’un ? Les amoureux fusionnels l’espèrent, les jumeaux le prétendent, les siamois le font … mais pas à des distances véritablement significatives. Bref, ce que l’intrication supprime, c’est l’individualité.

Bien sûr nous ne ferons jamais une expérience telle que celles des jumeaux. Mais cela ne doit pas nous faire oublier que nous aussi nous sommes plusieurs et qu’en nous aussi se pose la question de la fusion entre nos différents composants.

 

Il y a un philosophe qui a réfléchi à ce sujet, c’est Descartes. Il ne se demandait certes pas comment deux êtres séparés par l’espace pouvaient communiquer, mais bien comment deux substances différentes par leur nature et qui sont étroitement imbriquées l’une dans l’autre pouvaient communiquer ? Car l’âme et le corps sont pour Descartes distincts l’un de l’autre, et pourtant ils communiquent l’un avec l’autre de façon immédiate : « l’âme n’est pas logée dans le corps ainsi qu’un pilote dans son navire » ajoutait-il, soulignant que si le vaisseau (= le corps) se rompt quelque part, l’âme en est avertie immédiatement et autrement que par la vue. Le Traité des passions cherche à résoudre ce problème, mais s’il y a un mystère qui subsiste dans la philosophie cartésienne, c’est bien celui de l’union de l’âme et du corps. 

Or cette question n’est pas seulement métaphysique : elle pose directement la question de l’individu que nous nommes. Penchons-nous d’un côté plus que de l’autre, à charge pour nous de pencher du bon côté ? Ou bien devons-nous imaginer un mélange subtil entre ces natures différentes ?

La physique quantique ne répond pas à cette question, mais en tout cas elle maintient la parfaite identité entre les particules intriquées. Peut-être devrions-nous nous en inspirer ?

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(1) Formule latine pour « Je n'avance pas d'hypothèses » ou « Je ne feins pas d'hypothèses ». Newton ajoutait, parlant de la gravité : « il suffit que la gravité existe, qu’elle agisse selon les loix que nous avons exposées, & qu’elle puisse expliquer tous les mouvemens des corps célestes & ceux de la mer. » - Principia – Traduction Emilie Du Chatelet

Pour mémoire il nous a fallu pour aller plus loin mettre en évidence l'existence du boson de Higgs.

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