Bonjour-bonjour,
« Une photo de famille, arrachée d'une maison frappée vendredi soir par les tornades aux Etats-Unis, a semble-t-il parcouru plus de 200 kilomètres charriée par le vent.
En sortant samedi matin de son domicile situé dans la ville de New Albany, dans l'Etat de l'Indiana, Katie Posten a eu son regard attiré par ce petit cliché noir et blanc, venu se coller sur une vitre de sa voiture. » (Lu ici)
« Katie Posten a alors eu l'idée de publier le cliché sur ses comptes Twitter et Facebook, dans l'espoir de retrouver ses propriétaires. "Ouah. Penser qu'elle a voyagé si loin. Il s'agit des grands-parents de mon père", a écrit Cole Swatzell, sur Facebook. »
Pourquoi s’arrêter sur un tel fait divers alors que l’actualité regorge d’évènements plus excitants ? C’est que les mystères abondent : quel est ce hasard incroyable qui a fait parcourir à cette photo 200 km dans les airs 80 ans après avoir été prise ? Et pourquoi arrivant au terme de son parcours s’est-elle collée sur la voiture d’une personne – qui de surcroît s’est intéressée à elle, a enquêté sur Facebook, etc. : qu’est-ce que ça veut dire ?
Et pourquoi et comment... D’abord notons que le hasard sans cesse sollicité dans cette histoire doit être défini : selon Cournot qu’on cite fréquemment, le hasard ne signifie pas « absence » de causes mais au contraire « surplus » de causes. Le hasard résulte en effet de la rencontre de plusieurs séries causales indépendantes. Ainsi, la tornade, sa force, sa direction ne tiennent aucunement au hasard ; la solidité de la photo, sa capacité à conserver sa lisibilité est également parfaitement déterminée. Enfin la position de la voiture qui a « recueilli » le document à son arrivée est déterminé par les habitudes de sa propriétaire. Mais que tout ça ait eu l’occasion de se « rencontrer » n’a pas de cause, d’où la perception de cet enchainement d’évènements comme parfaitement aléatoire – alors que seule sa conclusion peut l’être.
Alors, bien sûr, partout où l’enchainement habituel des causes échoue à expliquer les évènements, l’esprit humain refuse d’avouer qu’un évènement inexplicable peut arriver et comble ces lacunes en imaginant des raisons significatives. Toute l’époque pré-scientifique en témoigne, mais plus près de nous, les surréalistes ont imaginé le hasard objectif non seulement pour expliquer les faits aléatoires, mais aussi pour confirmer l’insuffisance de la raison pour donner du sens au réel.
André Breton définit ainsi le hasard objectif : « ce serait la forme de manifestation de la nécessité extérieure qui se fraie un chemin dans l’inconscient humain » (L’amour fou)
- Pourquoi cette photo collée sur cette voiture après 200 km dans les airs ? Je ne le sais pas, mais il me suffit de le constater pour savoir qu’il y a quelque chose que mon esprit ne connait pas, mais qui agit malgré tout. Et ce n’est pas fini : pour connaitre l’inconnaissable, la raison est en échec, mais il nous reste l’inconscient, force obscure mais qui montre sa puissance à produire du sens dans les cas du rêve, les délires de l’imagination, ou états de pathologies cérébrales
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