Bonjour-bonjour
Tandis que notre monde privé regorge de sécurités, d’assurances, de boucliers etc., celui de la finance n’aime vraiment que le risque : en témoigne cette info repris d’un article de BFM-News : « Les investisseurs saluent la fin de la quarantaine obligatoire pour les personnes arrivant sur le territoire chinois : l’appétit pour le risque revient à la Bourse de Paris. »
- Bien sûr n’importe quel risque ne ferait pas grimper la Bourse : s’il s’agissait d’une guerre régionale dans les zones de production de pétrole ou d’une émotion populaire secouant un dictateur ami des financiers, ça ne serait pas la même chose. Mais voilà que la Chine redémarre ses usines qui produisent à destination des investisseurs occidentaux libérant le flux des capitaux : bonne affaire ! Bien sûr il va peut-être y avoir un million de morts du covid en Chine, suite à ce débridage sans aucune sécurité : mais si les financiers se soucient de leurs capitaux, peu leur chaut que des travailleurs périssent : on l’a bien vu avec le sort des travailleurs immigrés au Qatar.
o-o-o
C’est l’occasion de revenir à la notion de risque dans son rapport à la finance : si par « finance » on entend toute opération qui permet louer de l’argent en échange d’un intérêt, on peut alors admettre que celui-ci soit justifié par le risque encouru de ne jamais revoir son argent.
Soit – Mais ça ne suffit pas : ce n’est pas seulement l’anticipation du remboursement qui compte, c’est aussi le bénéfice réalisé par l’argent investi – c’est donc sa fructification qui importe.
- On sait que l’Église a interdit le prêt à intérêt comme une spéculation revenant à extorquer de l’argent aux plus pauvres obligés d’emprunter pour vivre. Pourtant, la Bible contient un passage fort troublant où la finance et le gain produit par les intérêts est fortement valorisée : il s’agit de la Parabole des talents qui enseigne que faire fructifier de l’argent répond symboliquement à la volonté de Dieu (Matthieu, 25 :14-30). Comment comprendre ?
C’est que cette condamnation ne visait pas le profit d’entreprise, ni la participation à un projet avec les risques correspondants, ou tout investissement en fonds propres, car il s’agit en réalité de tout ce qui « participe à ses risques et périls au commerce du marchand et au travail de l’artisan » car alors il est « en droit de réclamer, comme une chose lui appartenant, une part du bénéfice » comme dit saint Thomas d’Aquin.
Voilà les marché absouts, eux qui font circuler leur argent par gros temps, quand les risques encourus sont bien présents ?
- Pas si vite ! Qu’en est-il du mécanisme permettant à de l'argent de "faire des petits" ?
Le propre du capitaliste est en effet de tirer de l’argent un bénéfice qui n’entame en rien son capital, ce qui, toujours selon saint Thomas (Summa Theologiae II IIae q 78) revient à « vendre séparément l’usage de l’argent et la substance même de l’argent ; or l’usage de l’argent … ne diffère pas de sa substance » : la substance d’un morceau de pain ne diffère pas de son usage qui est de le consommer. Or, en prêtant mon argent, je fais payer son usage qui appartient en effet à l’emprunteur, mais pas sa substance qui me revient sous forme de monnaie sonnante et trébuchante.
C’est bien ce que l’usurier entend faire de son or : le conserver et continuer à s’enrichir en le faisant circuler uniquement pour en toucher les intérêts. Et c’est aussi ce que fait le capitaliste dont le credo est l’accumulation du capital somme d’argent définie par sa merveilleuse propriété de s’accroitre indéfiniment.
C’est ce que Marx entendait par le fétichisme de l’or et de l’argent.
------------------
N.B. Les références à Thomas d’Aquin sont reprises de ce site.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire