samedi 20 avril 2024

Ricardo, Marx, Michelin : une même théorie du salaire – Chronique du 21 avril

Bonjour-bonjour

 

Le groupe de pneumatiques Michelin a annoncé mercredi à Clermont-Ferrand la mise en place d’un salaire "décent" et d’un "socle de protection sociale universel" pour ses 132 000 salariés dans le monde.

Salaire décent… Le salaire minimum – alias SMIC – ne serait donc pas « décent » ?

Lisons (ici) la définition : « Le salaire décent ("living wage" en anglais) doit permettre de couvrir les besoins fondamentaux d'un individu – comme le logement, les repas, la santé et l'éducation - et des personnes dont il ou elle a la charge. » 

 

Vous voyez la différence ? Non ? Réfléchissez : alors que le SMIC est un montant minimum, certes, mais identique d’un bout à l’autre de la France, voici que le salaire décent garantit la satisfaction de certains besoins fondamentaux quel que soit le lieu considéré. On sait par exemple que se loger et se déplacer en Ile-de-France coûte plus cher que partout ailleurs : les smicards francilien ne peuvent couvrir leurs besoins avec leur salaire alors que c'est possible ailleurs.  Le salaire décent de Michelin est ainsi évalué jusqu’à trois fois le SMIC.

Est-ce donc si nouveau que cela ? 

En fait on retrouve la théorie du salaire « naturel » de Marx, lequel la tenait de Ricardo si je ne m’abuse. Il s’agissait de définir la valeur du travail fourni par l’ouvrier, qui se mesure à l’argent nécessaire pour se procurer l’équivalent de ce qui a été consommé durant le travail, à savoir : de quoi se nourrir, se loger et élever les enfants qui, devenus adultes, viendront remplacer leurs pères dans la fabrique. Ce salaire n’est pas soumis aux fluctuations du marché, mais il se mesure aux besoins fondamentaux. (Sur tous ces points on se reportera à Marx dans son ouvrage intitulé Salaire, prix et profiten ligne ici).


On dira qu'il est impossible de mesurer ces besoins fondamentaux parce qu'ils changent avec les époques. 

 

Les besoins fondamentaux fin 19ème siècle

 

Comme on le voit, dès le 19ème siècle il a fallu intégrer un temps de loisir au salaire naturel : il doit permettre de vivre et pas seulement survivre. Le salaire décent de Michelin doit intégrer le cinoche du mois (ou de la semaine ?)


- Alors, nous n’aurions donc rien inventé depuis1865, date de la publication du livre de Marx ?

Si fait : nous avons inventé le juste partage des profits entre les actionnaires et les ouvriers ; et pour cela nous avons aussi inventé la participation des employés à la gouvernance de l’entreprise. Mais c’est là que ça coince un peu…

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