samedi 8 août 2020

Spécial prise de tête – Chronique du 9 août

Bonjour-bonjour

 

Chaleur, sommeil rare, insomnie… Et si je vous racontais mes insomnies comme d’autres vous racontent leurs rêves ?

Seulement je vous préviens : les insomnies d’un philosophe, sont un peu… comment dire ? Tarabiscotées ? Oui, c’est ça : tarabiscoté. 

J’étais donc sur le coup de 2h du matin, en train de penser au chat de Schrödinger. Vous savez, il ne s’agit pas du chat qui fait « miaou » sur les toits, mais plutôt d’un animal imaginaire qui serait à la fois vivant et mort dans une expérience de pensée consacrée à la physique quantique : figurant ce mode d’existence des particules qu’on appelle « superposition d’état », on l’imagine enfermé dans une cage où une machine lui distribue de façon aléatoire des boulettes : les unes sont comestibles, les autres sont empoisonnées. La question est : le chat sera-t-il mort ou vivant quand on ouvrira sa cage ? Et la réponse est : il est dans ces deux états (à la fois vivant et mort) tant qu’on ne l’a pas ouverte ; en suite il sera soit l’un soit l’autre.

Attendez ! Ne partez pas tout de suite, car voilà que je me disais : et si, au lieu du chat, c’était moi (ou vous) qui étais à cette place ? Qu’est-ce que ça changerait ? Oui, imaginons que je sois à la fois et vivant et mort : à quel état de conscience ça correspondrait ?

Voilà : bye bye Schrödinger et bonjour Descartes – car n’est-ce pas à une expérience de conscience comme celle du cogito que je serais convié ? En effet, si la conscience de l’objet perçu peut être parfaitement illusoire comme l’a justement repéré Descartes, par contre aucun doute n’est possible quant au sujet percevant : je suis, comme comme tel, certain de mon existence - « cogito ergo sum ». Par contre, un cogito « schrödingerien » supposerait la superposition de l’état d’un être existant, et de l'état du non-être (sic). Expérience ontologique inimaginable qui reviendrait à importer dans la philosophie l’impensable quantique, comme une traduction de cet état des particules qui disparait dès lors qu’on s’intéresse à des objets macroscopiques. Et alors ? Dans mon corps, comment penser ce transfert ? Peut-être en songeant à l’état qui sera le nôtre après notre mort. Oui, si notre corps subsiste encore, ce sera bien sous forme de molécules disjointes les unes des autres et retournées à l’état quantique. Et notre conscience ? Et nos désirs, nos colères, nos émerveillements : existeront ils encore ? Si oui, alors nous serons bien, comme le chat de l’histoire, dans plusieurs états à la fois.

Songerie stérile de nuit caniculaire ? Pas tant que ça, car le sujet avait intéressé Diderot : « Ceux qui se sont aimés pendant leur vie et qui se font inhumer l’un à côté de l’autre ne sont peut-être pas si fous qu’on pense. Peut-être leurs cendres se pressent, se mêlent et s’unissent. » écrivait-il à Sophie Volland le 15 octobre 1759.

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