Bonjour-bonjour
Suite au « bain de foule » d’Emmanuel Macron en déplacement hier en Alsace, beaucoup se sont interrogés sur l’opportunité pour lui de s’exposer à la colère – voire même à la haine – de la foule. Ses justifications, inopérantes sur des manifestant exaspérés, accompagnent des affrontements qui vont donner une visibilité supplémentaire à la contestation : « Les gens ont quand même envie qu’il y ait des images de contestation. Où qu’il aille, il trouvera des opposants », explique un participant à la réunion » (Lu ici)
Parmi les explications, certaines font intervenir le terme de « catharsis », mot qui, venu du grec ancien, véhicule avec lui un contexte qu’il est bon de rappeler. Selon Aristote la catharsis correspond à une purification des passions grâce à la représentation dramatique. Cette définition associant le spectacle à un effet psychologique est liée à une fonction de la tragédie grecque qui n’a plus cours aujourd’hui. Elle a été transposée par Freud de la façon suivante : « Selon Freud, en psychanalyse, la catharsis est tout autant une remémoration affective qu'une libération de la parole, elle peut mener à la sublimation des pulsions. » (Art. Wiki) Ainsi – sans même faire référence à la remémoration – la catharsis psychanalytique a au moins deux effets : l’un de libérer la parole ; l’autre de sublimer les passions.
C’est là que la démarche d’Emmanuel Macron prend son sens. Car pour « passer à autre chose » comme il le souhaite, il faut que les conflits aient libéré la totalité de leur potentiel énergétique. Ceci se fait dans la vie quotidien dans le face-à-face avec un adversaire ; mais dans le cas présent, alors que c’est précisément le Président qui est pris pour seul responsable des traumatismes subis, ce face-à-face manque et la parole libératrice ne peut trouver une expression dans les slogans et autres invectives des défilés contestataires. Il faut donc, comme le dit Emmanuel Macron être « à portée d’engueulades »
On le voit il ne s’agit pas seulement de « libérer la parole », mais à coup sûr de la rendre solidaire d’une dépense pulsionnelle du fait de la présence de son destinataire.
- La démarche politique ayant comme on l’a dit, pour objectif de « tourner la page », de « passer à autre chose », la sublimation (1) résultant de cette catharsis est tout à fait souhaitable.
Admettons en effet que le mécontentement populaire soit chronique : nul ne peut éradiquer la quantité de violence suscitée par la frustration venue de la vie quotidienne. Mais lorsque cette violence sort de sa latence, alors elle cherche un objet sur lequel se fixer : le Président, ou des immigrés, ou les jeunes des banlieues, ou qui on voudra – qu’importe ? On n’aura rien gagné en termes de paix sociale. La sublimation intervient alors pour transformer l’affect de colère ou de violence en énergie active pour transformer le monde, actualiser des idéaux, voire même (pourquoi pas ?) créer des œuvres d’art.
--> Engueuler le Président, ça soulage peut-être mais surtout ça libère des forces pour faire autre chose.
Notre Président est donc en l’occurrence plutôt freudien
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(1) « La sublimation en déplaçant l’objet de la pulsion sexuelle met à la disposition du travail culturel des quantités de forces extraordinairement grandes et cela par suite de cette capacité spécialement marquée chez elle de pouvoir déplacer son but sans perdre pour l'essentiel de son intensité. » Lu ici
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