mardi 6 octobre 2020

Sophie Pétronin est libre - Chronique du 7 octobre

Bonjour-bonjour

 

Sophie Pétronin l’humanitaire française enlevée au Mali était retenue en otage depuis le 24 décembre 2016. Elle a été libérée à l’issue de négociations aboutissant à la libération de plus d’une centaine de djihadistes. (Lu ici)

 

Rien que de très ordinaire, dira-t-on. Sauf que personne ne se rappelait plus de son existence, ni bien sûr de sa détention… Ceux d’entre nous qui ont une longue mémoire se rappellent pourtant encore d’autres otages, comme Florence Aubenas, journaliste à Libé, dont le portrait fut sur toutes les mairies pendant de longs mois, ou Hervé Guesquière dont la photo apparaissait chaque jour à l’issue du JT. Pour Sophie Pétronin, rien de tout cela et si elle n’avait eu un fils déterminé à obtenir sa libération, personne n’aurait rien su de son sort.

 

Nous ne prétendons pas savoir si ce fut pour elle une malchance ou bien si au contraire ces négociations ont eu une meilleure opportunité d’aboutir dans les ténèbres médiatiques – on a quand même mis 4 ans à trouver une issue favorable. Mais surtout, sa détention n’a pas paru suffisamment scandaleuse pour remuer durablement l’opinion : même averti des risques qu’elle courait du fait d’une santé fragile, les réseaux sociaux ne se sont pas mobilisés, pas plus que les médias nationaux. On dira peut-être que les temps ont changé, que par exemple, dans les années 70, le rapt et la détention de madame Claustre au Tchad fut une affaire d’État traitée au plus haut niveau politique – au vu et au su de tout le monde. Quant à madame Betancourt et à son passage en France après une libération rocambolesque, nul ne l’a oubliée. 

Non, rien de tout cela ne nous a étonné à l’époque, mais il faut le dire, aujourd’hui nos émotions ne se cristallisent plus sur les mêmes évènements. J’imagine le psychisme humain comme une machine à produire des émotions. De même qu'autrefois on pensait que nous avions des humeurs qui s’écoulaient depuis notre tête jusque dans les profondeurs de notre corps, on croit aujourd’hui que nos émotions sont issues de centres spécialisés de notre cerveau où elles sont produites en quantité variables selon les circonstances et d’où elles doivent absolument s'évacuer sous peine de troubles plus graves. C’est ainsi que, dès que surgit un traumatisme, on met en place des cellules de soutien psychologique dont le rôle est de faire parler les victimes afin que leurs émotions ne restent pas enfermées dans le psychisme où elles risqueraient de faire des dégâts.

Les émotions sont probablement les plus anciennes manifestations du psychisme humain, sans doute bien plus anciennes que la raison qui a dû attendre l’apparition du néocortex pour exister, et elles ont suffi à assumer la survie de l’espèce dans la lointaine époque où elles étaient seules. Elles étaient alors assez solides, assez réactives pour permettre des comportements efficaces, sans quoi nous ne serions plus là pour en parler. Avions-nous donc  un « pragmatisme émotionnel » à l’époque du paléolithique ?

Nul ne sait. Notons simplement que dans ces temps lointains on n’avait pas encore inventé les chaines d’info 24/24 et qu’Internet n’existait pas encore.

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