lundi 31 mars 2025

Du provisoire définitif – Chronique du 1er avril

Bonjour-bonjour

 

L’application à Marine Le Pen à titre provisoire de la peine d’inéligibilité pour 5 ans soulève des contestations politiques, mais aussi juridiques. Comment est-il possible de prétendre que cette peine soit « provisoire » alors même qu’elle est d’ores et déjà mise en œuvre ?  Si après l’avoir appliquée on juge que madame Le Pen est innocente des faits pour lesquels elle a été déclarée inéligible, elle a pourtant bien été définitivement empêchée de se présenter à la Présidence de la République. On devrait dire alors que cet empêchement est illégal – et donc ne devrait pas être appliqué.

 

Les juristes sont des gens méthodiques et rigoureux. Ils ne prennent aucune décision qui n’ait été argumentée et justifiée. Écoutons donc ce qu’ils nous disent :

- D’abord cette « exécution provisoire » se justifie par un principe de précaution. Marine Le Pen ayant au cours de son procès refusé de reconnaitre les faits qui l’incriminaient – même les plus évidents et pour lesquels elle n’avait aucune justification à produire – le risque de récidive était avéré.

- Un justiciable mis dans cette situation en raison de son comportement dans l’exercice de ses fonctions (par exemple un enseignant mis en cause pour comportement inapproprié vis-à-vis de ses élèves) est suspendu par mesure conservatoire jusqu’à ce que l’exactitude des faits qui le mettent en cause ayant été réfutée il soit réintégré dans ses responsabilités. Le même raisonnement est appliqué à madame Le Pen jugée par le Tribunal comme étant susceptible de reproduire le délit de détournement de fonds publics.

- Cette mise à l’écart provisoire étant laissée à la discrétion des juges, on estime que leur décision aurait pu parfaitement être autre et on affirme alors que cette sanction est de nature politique et non juridique. La liberté laissée aux juges les dispense de prendre en compte cette objection ; toutefois, la Juge a cru bon de répondre : le fait que madame Le Pen ait l’intention de briguer la présidence de la République rend d’autant plus nécessaire qu’elle soit blanchie de tout soupçon.

 

Alors, oui : malgré la rigueur du raisonnement des juges, la liberté qui leur est laissée ouvre la porte à la critique de décision politique. Résultant de l’obligation de l’individualisation des peines, on ne peut en effet laisser de côté le fait que la justiciable, étant une personnalité politique, le sort qui lui est réservé ait aussi un effet politique. 

Regrettable, mais inévitable.

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