jeudi 20 janvier 2022

Le glaive et le bouclier – Chronique du 21 janvier

Bonjour-bonjour

 

La campagne électorale d’Éric Zemmour ne cesse d’allumer des incendies en particulier lorsqu’elle prétend repenser l’histoire de France. Ainsi de son affirmation de rôle de sauveur des juifs qu’aurait joué le maréchal Pétain durant l’occupation. Réintégrant celui que l’histoire considère comme le premier des collaborateurs français dans l’Histoire héroïque de la France, Zemmour prétend réécrire le roman national, œuvre collective et sacrée, en redistribuant les rôles : au général de Gaulle le glaive, au maréchal Pétain le bouclier.

Or on ne réécrit pas comme ça le roman national.

Observons d’abord que ce « roman national » qui revient au premier plan en ce moment où la question de l’identité nationale est prégnante, n’a pas un auteur attitré. Écrit à plusieurs mains par des journalistes, des romanciers, des idéologues – voire même par des essayistes soucieux de raccorder les faits à une vision téléologique de l’Histoire de France, il est fait d’amalgames successifs, d’épisodes historiques remaniés et de personnages héroïques ou légendaires. On sait par exemple que la guerre 1914-1918 a été l’occasion de décrire comme une gloire la lutte de l’armée Française pour rendre aux alsaciens leur véritable patrie.

 

 


Hansi, illustrant l’Alsace occupée rêvant de la France

 

Il faut maintenant observer aussi que le roman national a connu plusieurs versions au cours de l’histoire, et que certains – comme Éric Zemmour – voudraient retourner à une édition antérieure. Au fond tout le programme de sa campagne électorale est déjà écrit dans une de ces versions : par exemple celle qui revient à l’école de Jules Ferry ; celle des rois de France -en particulier de Louis XIII consacrant la France à la Vierge Marie ; celle de Jeanne d’Arc boutant l’anglais hors de la Patrie ; celle Saint Louis et des croisades ; celle de Charles Martel...(1)

Dans notre édition actuelle du roman national le dernier chapitre est écrit par le général de Gaulle et par les glorieux résistants qui ont inspiré les français durant ces quatre années d’occupation. Car ce chapitre nous apprend que, comme les petits alsaciens de Hansi, entre 1940 et 1945, tous les français ont écouté radio Londres et comploté contre l’occupant. Ce qui n'est pas anodin, car le rôle du roman national est effectivement de permettre une conciliation ou une réconciliation des français en leur proposant une mémoire commune à partager. 

C’est à ça que monsieur Zemmour porte atteinte aujourd’hui. 

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(1) On aura une idée de ce que représentent certains de ces épisodes en allant sur le site de « La meute France »

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