Bonjour-bonjour
Les années passent, les affaires de violences faites aux femmes restent. Ainsi du cas de Gérard Depardieu, à qui une quinzaine de viols sont imputés. Le Chef de l’État a donné un bruyant sauf-conduit à l’acteur au nom de son talent et de son œuvre dont la France peut être fière (et on sait que le Président est à l’affût de tout ce qui peut nous rendre fiers)
Cette affaire et la polémique qui l’accompagnent recycle une fois de plus des thèmes usés jusqu’à la corde, mais qui produisent toujours des effets :
- Ainsi Bernard Werber pour qui soutenir Gérard Depardieu c’est « oublier les victimes et le sort de milliers de femmes dans le monde qui souffrent d’un état de fait trop longtemps admis ». Autrement dit en absolvant Depardieu, j’absous les violeurs de tout poil qui sévissent impunément de par le monde.
- Également, refuser que l’art puisse absoudre les crimes des artistes, comme le laissait supposer le chef de l’État (cf. ci-dessus). « Au nom de l’art, certaines voix s’élèvent pour défendre Gérard Depardieu, insinuant que son talent devrait le soustraire à toute critique, et même l’excuser pour ses comportements intolérables. » (Tribune publiée le 31 décembre dans Libération)
- Réciproquement, les crimes commis par l’artiste devraient condamner son œuvre : largement débattue dans l’affaire Polanski, cette question a été remise sur le tapis par France-Télévision qui refuse désormais de diffuser des films où figure l’acteur dans un rôle principal.
- Enfin, et c’est là-dessus que j’insisterai, ce qui frappe, c’est l’étrange impunité dont a joui Gérard Depardieu lors de ses agressions sexuelles dont certaines étaient de notoriété publique, voire même commises en présence des techniciens du plateau. On a expliqué cette impunité par le pouvoir dont disposait alors la star ; un peu comme Harvey Weinstein, du temps où tout le monde savait quel traitement était réservé aux femmes qui acceptaient d’aller « discuter leur contrat dans sa chambre d’hôtel ».
Alors, peur du pouvoir ? Ou plutôt admiration sans borne pour le talent ?
- Le silence des témoins et peut-être aussi celui des victimes viendrait peut-être aussi d’un aveuglement : s’il est commis à l’encontre de personnes supposées consentantes, ou qui sont par leur statut confinée dans le rôle d’objet de convoitise, alors le viol n’existe même pas. La faute – à supposer qu’elle existe – ne serait qu’une simple exagération : une bourrade amicale dans l’épaule « Gégé, tu exagères ! »
- Et si la faute pouvait exister même quand elle n’a pas été voulue, ni ressentie comme telle par celui qui l’a commise ? Si elle existait quand même dans la vie des femmes dont l’intimité a été violée ? Si c’était cela qui lors du déclenchement de ces affaires donnait l’illusion que la faute était rétrospective, comme si l’innocence d’hier devenait tout à coup la faute d’aujourd’hui ?
Je veux bien croire que ces violenteurs ont bonne conscience et que les accusations dont ils sont à présent l’objet ne produisent chez eux que de l’étonnement. Ce sont pourtant des gens qui connaissent bien les techniques du cinéma, en particulier celle du champ/contre-champ : on filme une personne face à une autre, et puis on retourne la caméra pour filmer l’autre. Imaginons alors la star qui devant tout le monde fourre sa grosse patte dans la culotte de script-girl ; et puis en caméra subjective voyons cette main s’enfoncer dans l’intimité de cette femme.
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