jeudi 14 mai 2020

Victime ou criminel ? – Chronique du 15 mai

Bonjour-bonjour,
Cette semaine de déconfinement a pû être pour vous l’occasion de vérifier que vos amis plus ou moins proches étaient parfois assez peu pressés de vous rencontrer autrement que par écran interposé.
- Oui, mon chou, moi aussi j’ai très envie de te retrouver. Mais tu ne crois pas qu’il vaudrait mieux attendre de voir comment les choses tournent ? Observer si l’épidémie recule ? Imagine que l’un de nous ait attrapé le virus, ça serait abominable ! Oui, évidemment il faudra rompre ce retrait, mais pas tout de suite…

Ça, c’est sûr, ça a dû vous arriver, et votre déception a été à la hauteur de la défiance que vous inspirez. Mais vous avez peut-être aussi réfléchi un peu. Et si le porteur potentiel de virus c’était non pas vous mais l’autre ? Si au lieu de se méfier de vous on vous avait dit de vous méfier de celui qui se mettait en retrait ; qu’il cherchait en réalité à vous protéger ? Et si ce visage affectueux qui dans votre souvenir s’est estompé avec le temps réapparaissait, souriant – mais avec la rouerie de l’ogre qui attire les petits enfants avec des bonbons ? Si la victime du vampire se relevait après lui avoir succombé, et se tournait vers vous avec de très longues canines ?
C’est en effet cela qui nous trouble : depuis que le corona-virus nous a envahi, chacun peut en être porteur même sans le savoir, et contaminer à qui mieux-mieux sans le vouloir. Ce retournement est caractéristique des films d’épouvante, et si l’on pense en effet aux vampires on devrait également penser aussi aux morts-vivants qui fonctionnent exactement de la même façon. Le réalisateur sadique (comment prendre de la joie à réaliser de tels films autrement ?) joue d’ailleurs à fond là-dessus, montrant une jeune et innocente victime, fuyant la menace et puis, alors qu’on voudrait bien qu’elle soit sauvée, finissant par être rattrapée et devenant, l’espace d’un instant celle vers laquelle on se précipite avant de découvrir qu’elle est devenue elle aussi une « morte vivante ».

On mettait autrefois les jeunes hommes en garde vis-à-vis des jeunes femmes appétissantes, leur disant « Méfie-toi, ce beau fruit est peut-être pourri » – bien entendu la réciproque est vraie à propos des jeunes hommes porteurs de vilaines maladies – chacun devant alors vérifier si le ou la partenaire de son cœur avait des bonnes mœurs qui la protégeaient de ces maladies honteuses. On voit qu’aujourd’hui, personne ne cherche plus à se prévaloir de la moralité, et c’est normal parce qu’elle ne garantit plus de rien. 
Pas même de la pureté ? 
Et pas plus de la santé ? Non plus

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