dimanche 3 mai 2020

Ce qui fait peur c'est la peur de la peur – Chronique du 4 mai

Bonjour-bonjour

J’entendais hier un spécialiste (de quoi ? Je ne sais plus) disant que ce n’est pas l’avenir qui doit faire peur, mais plutôt la peur qu’on en a, parce que les décisions les plus dangereuses sont prises sous l'emprise de son affolement, alors que souvent on court bien moins de danger quand on prend juste les précautions utiles. C’est l’idée que les réactions inopportunes parce que décalées par rapport au danger réel, ou que les surréactions les plus risquées sont l’effet des angoisses et du stress cumulés qui entrainent les pires choses. On sait que les populistes sont friands de ces excès et que leurs plus habituelles manipulations consistent justement à exciter la peur en décrivant des dangers imaginaires afin d’apparaitre comme le recours unique et indispensable devant la frayeur qu’ils ont eux-mêmes créée.
On devine quels effets cela peut avoir en période de pandémie, combien de lynchage ou de cérémonies mystiques ont pu se nourrir de telles craintes de la maladie. Mais on peut aussi s’interroger : qu’arriverait-il à un peuple sans peur et sans angoisses ? Ne perdrait-il pas l’indispensable ressort de la prudence ?

Rappelons nos commentaires devant ces incroyables images venues de Chine en février, montrant les avenues de Wuhan, ville de près de 12 millions d’habitants, désertes ainsi que les magasins, les autoroutes ou les quais de train. Nous dissions à l’époque : « Il faut être chinois pour respecter les ordres venus des autorités. En France ça n’aurait aucune chance de marcher ! » On sait ce qu’il en fut quelques semaines plus tard, avec ces images des Champs-Élysées déserts. Que s’était-il passé pour que les français réputés frondeurs en viennent à obéir ainsi ? Étaient-ils devenus simplement raisonnables entre temps et ont-ils réfléchi pour conclure que l’intérêt public était dans le confinement ? On devine qu’il n’en est probablement rien mais que la peur de mourir intubé dans les affres de l’étouffement a été déterminante. Chacun se moquait des remontrances quotidiennes des autorités, mais aussi chacun se disait : « Périsse l’humanité, je m’en fiche. Mais que ça m’arrive à moi, ça non ! »
- Or, voilà que le niveau de peur diminue dans le pays : le futur déconfinement, bientôt chez nous mais déjà en cours chez nos voisins donne l’impression que le virus n’est plus si dangereux que ça, et même les plus froussards s’imaginent en sécurité avec un bout de chiffon sur le nez et des coudées franches pour tenir les voisins à distance. Nos amis chinois nous ont donné l’exemple avec ce chapeau d’écolier muni d’une barre d’envergure pour tenir à distance les proches. Il suffirait d’en importer – et voilà !



Mais ne va-t-on pas, en perdant la peur, perdre aussi la sécurité ?

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