samedi 19 septembre 2020

La nouvelle ballade de Narayama – Chronique du 20 septembre

Bonjour-bonjour

 

Vous avez entendu comme moi le professeur Raoult disant devant les sénateurs : « Cette reprise de l’épidémie n’en est pas une, d’ailleurs la plupart des morts sont des gens qui seraient de toute façon morts dans les mois qui viennent ».

Ces propos font étrangement écho à des déclarations du Président du Brésil, affirmant il y a quelques mois qu’on n’allait pas confiner le pays et donc arrêter son économie pour quelques vieillards qui, de toute manière, allaient mourir. Un même mépris face à la détresse et à la mort des vieilles personnes, l’un pour minimiser la réalité de l’épidémie, l’autre pour manifester que seules les activités économiques étaient importantes.

Ce dédain ne se manifeste-t-il que dans cette perspective, ou bien est-il la pointe extrême de quelque chose qui structurerait en profondeur la société ? On aurait alors la trace d’un mécanisme d’interdépendance sociale, chacun donnant et recevant des autres, et les improductifs tels que les enfants, les chômeurs, les malades n'étant considérés que comme futurs contributeurs à la communauté. 

Vous me voyez venir, je suppose : les vieux, les retraités, qui n’ont plus rien à donner et tout à attendre des autres, pourquoi ne pas les euthanasier ? – ou du moins les laisser mourir naturellement, sans s’acharner à les maintenir en vie ? C’est tellement vrai que les civilisations qui protègent les vieux et leur rendent un véritable culte après leur mort, comme les Romains de l’antiquité, estimaient que par leur proximité avec l’au-delà, les vieux avaient déjà la communication avec les âmes des défunts et étaient capable d’intercéder en faveur des vivants qui craignaient beaucoup leur méchanceté. C’était une façon de rétablir l’échange généralisé dans la société : "je te protège dans la faiblesse de tes vieux jours, mais n’oublie pas de parler en ma faveur aux mânes des ancêtres."


 En 1983 le film japonais de Shohei Imamura racontait comment dans le Japon traditionnel on emmenait les vieux âgés de 70 ans au sommet de la montagne de Narayama pour les abandonner à la mort.



Et si le corona-virus19 était notre montagne de Narayama à nous ?

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