lundi 31 mai 2021

Un peu d’humilité S.V.P. – Chronique du 1er juin

Bonjour-bonjour

 

Moi, il y a des trucs qui me font sursauter. Par exemple quand j’entends que dans son discours aux Rwandais destiné à les apaiser après l’horrible massacre dont la France fut hélas partie prenante, notre Président a dit en substance : « Je ne demande pas pardon pour la France, mais j’accepte qu’on l’excuse ». Accepter d’être excusé, est-ce une façon de reconnaitre qu’on a commis une faute ?

On savait qu’Emmanuel Macron était un maître en rhétorique et un subtile dialecticien ; mais là ça touche au génie – ou à la canaillerie, selon son humeur politique. On est dans l’emberlificotement des idées au terme duquel on ne sait plus qui doit faire quoi. 

 

- Le pardon est certes une attitude morale, un don que l’on fait sans égard aux circonstances ; mais peut-on accorder son pardon à quelqu’un qui ne le demande pas ? Peut-on dire « Je te pardonne pour ce que tu nies m’avoir fait ? » La reconnaissance de la responsabilité dans le mal qu’on a fait parait indispensable pour que le pardon s’exerce, parce que sans cet aveu il perd son sens. 

- Et puis voyez aussi cette attitude qui consiste à dire, non pas que l’on consent à demander pardon, mais qu’on consent à l’être.  Imaginez l’amant qui dirait à sa Dulcinée « Je ne te demande pas pardon pour l’infidélité que je viens de commettre ; mais vois-tu, parce que je t’aime encore, je consens à ce que tu me pardonnes. » Dehors le goujat !

Je constate que, quant à eux, les Rwandais se sont déclarés satisfaits avec ça ; étonnant, à moins qu’il y ait eu des compensations en dessous de table dont nous n’aurions rien su.

samedi 22 mai 2021

 CONGÉS ANNUELS


Réouverture le 1er juin

(Durant cette période, les archives restent ouvertes à votre vagabondage)


vendredi 21 mai 2021

Quelle maman êtes-vous ? – Chronique du 22 mai

(Une lectrice vigilante me signale que le fête des mères c'est le 30 mai et non le 23. Excusez ma pauvre tête bien fatiguée qui se plante dans les dates... De toute façon, pas de blog avant le 1er juin - donc je suis à la fois en avance et à l'heure.

Bizarre ?)


Bonjour à toutes les mamans

 

Oui, je sais : c’est seulement demain la fête des mamans… Mais demain je serai en vacances : pfuittt parti – plus de blog pour une semaine !

 

Alors fêtons notre maman quand nous avons la chance de l’avoir encore près de nous. Occasion de revoir nos premières années et de nous souvenir de la maman que nous avons eue, une maman sans doute la plus belle de toute, mais en même temps comparable à aucune. 

N’oublions pas en effet que les façons d'être mamans sont multiples, qu’elles se réinventent sans cesse et que même dans la nature les maman animaux sont d’une incroyable diversité.

Du reste  les mamans que nous fêterons demain ont peut-être déjà leur modèle dans le monde animal. Après tout, si nous devions partager avec nos amies les bêtes une fonction précise, ne serait-ce pas la fonction maternelle ? Je pense par exemple à Boris Vian (dans l’Arrache-cœur) décrivant une maman qui lèche son enfant comme une mère-ourse pour le nettoyer : ça avait fait scandale quand un prof de français avait fait lire ça à ses élèves de 4ème.

Par exemple :



Êtes-vous la « maman-nounou » ? Celle qui soigne, nourrit, protège et réchauffe son petit ? Elles seront sûrement fêtées et embrassées demain ces mamans-là, car y a-t-il un lien plus fort et plus solide que celui qui unit l’enfant à la femme qui l’a nourri ? 

o-o-o

Mais peut-être êtes-vous plutôt la « maman-marâtre » ? Celle qui terrifie et brime ses petits enfants ? La Folcoche d’Hervé Bazin ?

Je sais : l’idée de fêter les mamans marâtres est assez peu crédible ; en tout cas ça ne fait pas envie. Mais voyez cette maman-guépard :

 

  

si elle terrifie ainsi ses petits c’est peut-être pour les empêcher de sortir n’importe où sans protection ? Les prédateurs rôdent peut-être déjà autour de la portée attendant que la mère parte chasser pour assurer la survie de la nichée. Ne pas juger les mères sans connaitre les conditions d’existences qui furent les leurs durant leur maternité. Les femmes qui ont accouchée sous X ne seront pas de la fête demain. Ont-elles démérité pour autant ?   

jeudi 20 mai 2021

Une femme qu’on croyait décédée se réveille juste avant son incinération – Chronique du 21 mai

Bonjour-bonjour

 

Un petit fait divers pour passer le temps ? Par exemple celui-ci : « En Inde, une femme de 76 ans malade du covid s’évanouit et se réveille quelques minutes seulement avant sa crémation. » Lu ici

 


Le fantasme du mort pas mort, illustrée par le personnage du croque-mort, supposé mordre l’orteil des défunts avant de les mettre en bière -  histoire de s’assurer qu’ils sont bien morts - nous fait frissonner tant il est vivace. Et que cette étymologie soit fantaisiste n’y change rien : reste que ce déni de la mort qui frappe un être qui nous est cher est constant.

Sauf qu’ici ce refus concerne non pas l’autre, mais nous-mêmes. Car l’histoire du mort qui se réveille dans la tombe c’est d’abord l’angoisse qui nous saisit, lorsque nous imaginons notre propre mort. C’est qu’à travers la mort des autres, c’est bien notre propre mort qui se dessine : on se rappelle le célèbre poème de John Donne « N’envoie jamais demander pour qui sonne le glas : c’est pour toi qu’il sonne. »

On peut tout à fait ne pas se sentir concerné par cet étrange renversement qui nous fait souffrir quand arrive chez les autres ce que nous redoutons pour nous-mêmes. Mais c’est une banalité tant la chose est courante ; on pense par exemple à cette mamandise : « Couvre-toi, j’ai froid » (1) 

... Eh bien, nous y voilà : n’oubliez pas que dimanche ce sera le jour pour apporter à votre maman ces roses blanches qu’elle aime tant…

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(1) Une « mamandise » est une petite phrase que chacun porte en soi, entre la mémoire et l’instinct, plantée là par sa mère qui, elle-même la tenait de sa mère : « On ne parle pas la bouche pleine… Je ne suis pas ta bonne… Couvre-toi, j’ai froid » 

mercredi 19 mai 2021

Tous cons ? – Chronique du 20 mai 2021

Bonjour-bonjour

 

La sortie hier du film de J-M Dupontel Adieu les cons a mis en lumière la bizarrerie de cette notion que tout le monde utilise énormément sans savoir exactement la définir.

On a bien sûr demandé à J-M Dupontel ce qu’il entendait par connerie ? Sa réponse a été la suivante : « Vous, moi, nous sommes tous cons. La connerie, c’est ce qu’on est devenu avec ce qu’on a fait de nous. » 

- Bien sûr cette définition sociologisante est un peu courte. On n’oublie pas qu’à l’origine le « con » désigne le sexe féminin. Comment est-il devenu synonyme de bêtise ? Les sémanticiens rappelant qu’au cours du rapport sexuel le sexe de la femme est passif, qu’il se contente d’être ouvert et que seul le pénis s’active vraiment, estiment que le con est le type qui regarde bouche bée les choses arriver sans y rien comprendre (de la même façon le couillon est un idiot qui subit passivement les évènements, un peu comme les couilles qui, bien qu’étant un attribut qui fait l’orgueil de l’homme, restent dehors pendant le coït, ballotant comme des pompons ridicules alors que le pénis pistonne glorieusement).

- On ne peut oublier non plus le caractère envahissant des cons, dont Michel Audiard dit que « Les cons, ça ose tout, c’est même à ça qu’on les reconnaît » - formule qu’on ne rougira pas de citer, vu qu’Audiard l’a probablement pompée chez Thomas d’Aquin (1). Cette définition contredisant la précédente, on peut estimer que la difficulté de définir la notion tient à son homonymie (2). 

Saussure disait : « les mots n’ont pas de sens ils n’ont que des valeurs ». C’est ainsi que les cons ne sont pas les mêmes selon l’épithète dont on les gratifie : les « pauvres cons » sont ds gens qu’on n’aimerait pas fréquenter. Par contre les « braves cons », oui – peut-être qu’on partirait en vacances avec eux. Ce sont en tout cas des gens très fréquentables selon Georges Brassens : « Quand les cons sont braves /… / Ce n'est pas très grave. / Qu'ils commett'nt, / Se permett'nt / Des bêtises, / Des sottises, / Qu'ils déraisonnent, / Ils n'emmerdent personne. »

« A écouter ici chanté par Maxime Le Forestier)

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(1) Omnes stulti, et deliberatione non utentes, omnia tentant. (Traduction : Tous les imbéciles, et ceux qui ne se servent pas de leur discernement, ont toutes les audaces.)

Thomas d’Aquin – Somme Théologique, Prima Secundae, Question 40, Article 6

(2) Terme défini per Aristote au premier chapitre des Catégories : Deux occurrences de mots identiques (ou deux sons identiques) peuvent renvoyer à deux notions distinctes (ex : « kleis » qui signifie clef ou clavicule). 

mardi 18 mai 2021

Où l’on reparle de Jojo le gilet jaune – Chronique du 19 mai

Bonjour-bonjour

 

« Jojo avec un gilet jaune a le même statut qu'un ministre ou un député ! »

Vous vous rappelez peut-être de ce persiflage d’Emmanuel Macron en pleine contestation des Gilets jaunes, irrité de ce que « Jojo-le-gilet-jaune » se prétendait apte à critiquer l’action des ministres et à leur dire ce qu’ils devaient faire ? Eh bien malgré cela, Gérald Darmanin a donné raison au bon sens du boucher-charcutier de Tourcoing contre les études de victimisation (cf. ici)

Le bons sens populaire contre l’abstraction glacée des statistiques. Au fond tout ça n’est pas très nouveau : on se rappelle peut-être encore de Raymond Barre évoquant l’avis de son coiffeur concernant le chômage ; et plus loin encore de Socrate honorant les vertus déployées par les artisans, forgerons, cordonniers et autres.

Au fond, l’idée est que le contact, même ponctuel avec la réalité, est plus important pour la connaitre que son survol effectué grâce à des enquêtes, des mesures, des analyses. Pour connaître la France mieux vaut être à niveau d’autobus ou de guichet de poste. Bien sûr le boucher de Tourcoing ne connait peut-être pas grand-chose à la sécurité au-delà du pas de sa porte. Sa vérité, il ne l’a perçue qu’à travers le trou de la serrure. Mais l’opinion qu’il en a qui constitue un fait politique et c’est sans doute à ça que pense le Ministre de l’Intérieur.

Alors me direz-vous : et Jojo ?  

- Doit-on le clouer au pilori pour imbécilité ? Voilà bien l’arrogance des intellos : ça revient justement à donner raison aux Gilets et à leur haine des élites. 

- Faut-il alors lui donner raison au nom de l’expérience qui fait défaut aux ministres ? Mais malheureusement l’opinion n’exprime pas toujours la réalité mais seulement un fragment de celle-ci, comme on vient de le dire. Et surtout elle peut aussi être le produit de passions politiques comme l’a fait sans doute Jojo. 

- En tout cas, l’opinion est un fait – et même un fait politique. Savoir ce que pensent les bouchers de Tourcoing, les coiffeurs de premier ministre, les camionneurs en jaune, c’est très important pour obtenir qu’ils votent « bien »

lundi 17 mai 2021

Hommage à Axel Kahn – Chronique du 18 mai 2021

Bonjour-bonjour

 

Hier Axel Kahn est apparu dans le studio de France Inter puis sur le plateau de C à vous – et sans doute ailleurs au cours de la journée. Il venait annoncer que malade d’un cancer particulièrement agressif il ne serait bientôt plus et qu’il mettait un terme à ses responsabilités à la tête de la Ligue contre le cancer. 

Axel Kahn a le courage de nous dire qu’il arrive au terme de sa vie, qu’il est persuadé que mourir c’est être anéanti, mais que le temps qui lui reste il doit encore vivre – pleinement vivre. Refusant l’injonction du « lâcher prise » si prisée par les coachs de développement personnel, il se situe dans la lignée revendiquée des stoïciens, appliquant sans le nommer le précepte de Montaigne, le quel voulait que la mort le surprenne « plantant ses choux, indifférent à sa venue et plus encore à l’obligation … de laisser son jardinage inachevé » (Essais, 1-20) ». Il est un des rares à affronter ce qu’on appelle « l’en deçà de la mort », moment où celle-ci est imminente et parfaitement datée. Jankélévitch disait que la pire cruauté consistait à faire savoir au condamné à mort la date de son exécution ; c’est à cette épreuve qu’est soumis le cancérologue que fut Axel Kahn. 

Si son courage nous impressionne c’est parce qu’il affronte cette épreuve de continuer à vivre sachant que demain il sera mort. Toutefois il ne s’agit pas exactement de continuer à vivre « comme si de rien n’était » : certes, face à la mort il faut nous conserver nos principes, ceux qui ont soutenu notre vie ; mais en sachant les adapter à ce néant où nous allons basculer. 

 

- C’est ce que nous dit Axel Kahn :  demain je ne serai plus – plus rien – mais en attendant je dois continuer de vivre, comme j’ai toujours vécu, en me battant contre cette « saloperie de maladie ». Mais ce n’est pas tout : car même si le néant nous attend, une « vie après la mort » existe malgré tout : il s’agit de la trace que nous laisserons dans la mémoire de ceux qui nous auront connus. Au moment où nous arrivons à « l’en deçà de la mort », cette trace se nomme « transmission », et elle consiste à permettre que d’autres puissent tirer parti de notre expérience ; pour reprendre la métaphore de Montaigne il est vrai que nous ne mangerons peut-être pas les choux que nous venons de planter ; mais faisons en sorte qu’ils ne pourrissent pas sur pied et que d’autre puissent en profiter. C’est ainsi que le laboureur de La Fontaine sentant la mort venir ne manque pas de transmettre non seulement son champs mais aussi le principe qui permettra à ses enfants de ne pas mourir de faim.

Quand Axel Khan publia au mois de mars « Et le bien dans tout çà ? » il savait déjà que ce serait son dernier ouvrage et qu’il y transmettait ses ultimes vérités. Attendant la dernière limite pour dévoiler la réalité de son état, il nous montre qu’il meurt comme il a vécu – en luttant pour la morale. 

dimanche 16 mai 2021

Ni hao Mars – Chronique du 17 mai 2021

«Ni hao Huoxing» (Hello Mars) – la Chine réussit à poser un robot sur la planète rouge.

«Je suis toujours à l'intérieur du module d'atterrissage» et «impatient de savoir ce qu'il y a sur Mars», est-il écrit sur le compte officiel de Zhurong, le robot martien chinois. Info lue ici.

 

 

Bonjour-bonjour

 

Alors que va dire le philosophe ? Va-t-il s’étonner de la capacité de la Chine à trouver les moyens non seulement financiers mais aussi humains pour réussir avec une telle rapidité des opérations complexes sur la planète Mars, là où les américains ont mis plus de 20 ans à réussir ? Ou bien va-t-il ronchonner en disant que les informations scientifiques divulguées par la Chine seront toujours entachées de doutes suite aux mensonges d’État dont ce pays s’est rendu coupable au cours de l’épidémie de covid ? Mais non : le philosophe va s’étonner que la communication attribuée au robot le fasse parler à la 1ère personne : « Je suis toujours etc. » – d’autant plus que les robots américains font exactement de même. 

--> Et alors, depuis quand une machine disposerait-elle du « Je » c’est-à-dire de la conscience de soi ? « Posséder le Je dans sa représentation : ce pouvoir élève l’homme infiniment au-dessus de tous les autres êtres vivants sur la terre. Par-là,  il est une personne » disait Kant (1) c’est-à-dire qu’il a le pouvoir de se saisir soi-même par un retour sur soi de la pensée, se constituant ainsi comme sujet pensant capable de dire « Je »

Certes, on peut imaginer que certains animaux comme les grands singes, seraient capables de se penser eux-mêmes sans pour cela avoir l’usage des pronom personnels ; d’ailleurs ce pronom personnel peut très bien manquer dans certaines langues. Mais que la machine dont rien n’indique que ce retour réflexif soit à sa portée puisse parler d’elle-même à la 1ère personne, voilà que dérange.

Vous ne me croyez pas ? Alors rappelez-vous de l’opéra d’Offenbach intitulé « les Contes d’Hoffmann ». Olympia, le personnage principal du premier acte, qui est un automate construit par Spalanzani, chante l’air des « oiseaux dans la charmille » ; elle conclut par ce refrain : « Voilà la chanson mignonne / La chanson d’Olympia / d’Olympia ! ». Offenbach ne s’y trompe pas : Olympia est une machine parlante qui ne peut parler d’elle-même qu’à la 3ème personne : toujours comme objet, jamais comme sujet.

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(1) Kant – Anthropologie §1 (Lire le texte ici)

samedi 15 mai 2021

Des américains victimes d’« attaque acoustique » - Chronique du 16 mai 2021

Bonjour-bonjour

 

- Je lis le début de cet article : « Voilà cinq ans que de mystérieux maux touchent le personnel diplomatique ou certains agents des administrations américaines situés à l'étranger. Des troubles cérébraux qui ont été regroupés sous le terme « syndrome de la Havane ». Vertiges, nausées, acouphènes, irritabilité, céphalées... Les Américains ont baptisé cette menace « attaque acoustique ». »

- Je me dis : bon, ils les abrutissent avec du Métal ou du Hard rock. Procédé barbare qui relève de la CPI. Et puis je lis un peu plus loin : « les cerveaux des victimes connaissaient des liaisons cérébrales causées par un élément extérieur. Les autorités américaines soupçonnent l'utilisation d'un équipement spécial dirigeant des micro-ondes pulsées vers leur cible. »

- Et là, je sursaute : quoi ? On serait capable de modifier la structure cérébrale sans que rien n’y paraisse, ni que rien ne soit ressenti sur le moment ? Les pires fictions sont largement dépassées, car alors que les méchants Big-Brother d’aujourd’hui s’échinent à censurer la presse, à laver les cerveaux, à surveiller les déplacements pour emprisonner les récalcitrants, voilà que des espions peuvent, tranquilou, sans qu’on s’en aperçoive trafiquer notre encéphale à coup de micro-ondes.

Il est vrai que pour le moment on n’obtient que des perturbations pathologiques. Mais qu’est-ce qui empêcherait des ingénieurs plus avancés dans la technique de reproduire dans notre cerveau les connexions présentes dans le cerveau des Gardiens de la révolution ? Ou dans celui des Black-blocs ? Ou des supporters de foot ? Le procédé serait simple : on choppe un activiste particulièrement typique ; on scanne son cerveau ; et puis on fabrique l’algorithme correspondant et on le met dans la machine à micro-onde.

Et alors, diront les optimistes : qu’est-ce qui empêcherait de scanner aussi des cerveaux de grands savants, de pacifistes, ou même – tenez, je me risque : ne pourrait-on pas scanner le cerveau de Greta Thunberg ? 

Que du jour au lendemain, à coup de micro-ondes pulsées on soit tous devenus des Greta : le monde ne serait-il pas meilleur ?

vendredi 14 mai 2021

Le ravi de la crèche – Chronique du 15 mai 2021

Bonjour-bonjour

 

Quand je sors de mon lit, la première chose que je fais après avoir pris mon petit déjeuner, c’est consulter « Google-news ». Et là, à perte de vue, des morts, des meurtres, des manifestants violents, des policiers brutaux ; et puis des scandales, des internautes qui se mettent en rage ; et puis des ours blancs perdus sur des glaçons…

Bref, tout va mal et s’il est vrai que les infos qui me parviennent ont été choisies à mon intention par Intelligence Artificielle, je me dis « Ou bien j’ai le clic sélectif – et alors je dois m’interroger sur une déviation de ma personnalité – ou bien c’est cette foutue intelligence qui est particulièrement tordue ! » Même si, pour paraphraser Leibniz, ce monde est le pire des mondes possibles, il devrait quand même avoir des îlots de bonheur et de vie, sans quoi il disparaitrait aussitôt.

Mais quoi ? dira-t-on - qui ne voit que dans ce monde seul le désespoir est possible et que les gens heureux sont comme le Ravi de la crèche de parfaits crétins ?

 


Alors, certes cet homme, qui bras levé manifeste sa joie, est bon mais il est quand même selon la tradition un être inférieur que sa débilité mentale condamne à des tâches subalternes dans la village. Installé dans le monde moderne, le Ravi de la crèche est un homme toujours content - content des gouvernants, de son patron, de son épouse, etc. On en vient à penser que pour manifester son intelligence il faut dire combien on est mécontent de tout cela.

Du coup, je comprends pourquoi l’I.A. de Google ne me balance que des catastrophes : certes tout ne va pas si mal ; mais pour éveiller mon intelligence, il faut d'abord provoquer mon mécontentement.

jeudi 13 mai 2021

Des pirates rationnels. – Chronique du 14 mai 2021

Bonjour-bonjour

 

Colonial Pipeline (un réseau d’oléoducs de 8 800 kilomètres, qui dessert toute la Côte est américaine) a été paralysé par des hackers qui ont bloqué les systèmes informatiques avec un « rançongiciel », un logiciel qui crypte des fichiers et empêche leur utilisation. Colonial Pipeline aurait versé cinq millions de dollars pour débloquer ses logiciels et redémarrer la livraison de carburant. (Lu ici)

 

- Moi, je reste pantois devant une telle information : comment une industrie aussi stratégique que celle-là peut-elle être fragile à ce point ? Moi j’en étais resté aux virus informatiques qui détruisaient certains réseaux d’ordinateurs, se propageant selon le hasard des échanges de mails. On risquait de voir détruit tout son système informatique, le stockage des données et la confidentialité des échanges : l’attaque était planétaire mais les victimes étaient des particuliers, pas des organisations du niveau d’un État. 

Mais surtout c’était purement « gratuit » dans la mesure où aucune rançon n’était demandée ; ces pirates étaient de véritables anarchistes qui voulait détruire sans aucune condition.

Ils étaient des « purs », ils ne demandaient rien ; ce qu’ils voulaient c’était détruire et c’est tout.

Or voilà que les pirates d’aujourd’hui sont devenus des rançonneurs, des gens qui ne se donnent le mal de bloquer des systèmes informatiques que pour obtenir de l’argent en échange. Ce sont des pirates rationnels, du moins dans notre système capitaliste où rien ne se fait sinon contre de l’argent. 

Cette information serait plutôt rassurante, puisqu’on est en présence d’une criminalité bien connue : autrefois on enlevait les enfants de milliardaires ; aujourd’hui on bloque leur système d’exploitation numérique : rien n’a vraiment changé.

… Sauf qu’en s’en prenant au système de commandement de tout ce qui fonctionne de par ce monde ils ont un pouvoir de nuisance extraordinaire : ils peuvent prendre en otage les hôpitaux, comme on le voit en France, mais aussi les raffineries, et – pire encore – les centrales nucléaires. Les États se battent contre des ennemis qui menacent, tout en restant dans l’ombre, de les détruire et contre lesquels ils ne peuvent rien, sauf à revenir aux technologies d’autrefois.

La guerre numérique ne fait pas de morts - du moins pour l'instant - mais c’est quand même une guerre.

mercredi 12 mai 2021

Blanche-Neige et le baiser magique – Chronique du 13 mai

Bonjour-bonjour

 

Des ligues féministes ont réclamé que Disneyland retire son attraction reproduisant le baiser donné par le Prince à Blanche-Neige endormie puisqu’elle n’a pu consentir à ce baiser qui par conséquent est un baiser volé. « Un baiser qu’il (= le Prince) lui donne sans son consentement, pendant qu’elle dort, ce qui ne peut pas être le véritable amour à moins que la personne sache ce qu’il se passe », écrivent Katie Dowd et Julie Tremaine. (voir ici)

 


Allons-nous priver nos enfants de la magie des contes de fées, ou bien nous récrier en évoquant :

1° le fait que pour Blanche-Neige ce baiser n'est pas seulement le baiser d'amour, mais qu'il est surtout un rituel magique (cf. infra le baiser à la grenouille) et qu'il est le seul moyen de la sauver du sortilège de la méchante sorcière ;

2° que Blanche-Neige à son réveil est immédiatement amoureuse du Prince Charmant, et que s’il lui avait demandé son consentement elle aurait dit « OUI. Oui-oui-oui-ouiiiiii ! » ;

3° que les enfants ont de tout temps fait la différence entre les contes de fées et la réalité – et qu’ils s’y intéressent justement parce qu’ils en diffèrent ;

4° enfin que cet épisode est l’occasion pour les parents de montrer aux enfants que, si ce genre de baiser est permis du fait de la magie du conte, dans la réalité les baisers doivent être explicitement consentis.

o-o-o

On n’en a pourtant pas fini avec les baisers magiques qui sont couramment utilisés dans les films de Disney pour obtenir la transformation miraculeuse d’un crapaud ou d’une grenouille en Prince ou en Princesse. On n’a jamais entendu quiconque protester au nom du respect dû aux grenouilles de ne pas se voir imposer un baiser impromptu. D’ailleurs, comme le montre cette image tirée de « La princesse et la grenouille » le petit animal parait absolument consentant.

 

 

Bon – la question du baiser volé ne se pose pas ici : alors pourquoi en parler ?

Eh bien voilà : après que Disney ait sorti le film d'animation « La princesse et la grenouille », plus de 50 enfants ont été hospitalisés après avoir embrassé des grenouilles : ils avaient attrapé la salmonelle.

Alors certes, les enfants ne risquent pas une telle mésaventure avec Blanche-Neige. Mais ça pose bien quand même la question sanitaire : voit-on le Prince faire un test PCR avant d’embrasser la belle endormie ? Non. 

mardi 11 mai 2021

Devrions-nous renoncer à la lucidité ? – Chronique du 12 mai 2021

Bonjour-bonjour

 

Heureux les animaux qui broutent paisiblement à deux pas de l’abattoir – mais ce bonheur n’est pas pour nous.

Si l’insouciance est la condition du bonheur alors admettons que l’homme moderne n’est pas armé pour être heureux : plus il sait moins, il espère. Telle est la leçon des moments que nous vivons si nous raccordons le souci des pandémies futures à celui de l’inexorable extinction des formes de la vie actuelle. « Celui qui augmente sa science augmente sa douleur » dit avec raison l’Ecclésiaste (1:18).

On voudrait croire que la science dans laquelle nous avons depuis plusieurs siècles placé tous nos espoirs va quand même nous apporter la solution pour continuer à vivre comme avant. Mais la science nous répond : « Oui, on peut inverser le cours des choses, mais à condition de renoncer à ce qui fait votre bonheur : plus de nuits à transpirer sur les dance-floors serrés les uns contre les autres ; plus de voitures qui font vroum-vroum. » Tâchez donc de vivre heureux après avoir entendu le professeur Delfraissy nous promettre, pour notre éventuel retour aux joies de la « vie d’avant », la maladie et la mort ; ou encore, après avoir écouté un climatologue tel que Jean Jouzel nous révélant que l’apocalypse est tout juste pour demain si nous continuons à vivre au dépend de la planète.

Tout se passe comme si la prévoyance ne pouvait nous faire connaitre rien d’heureux, parce que nous voulons à la fois le bonheur dans la jouissance et dans la consommation tout en ayant la sécurité de l’avenir, alors qu’on sait maintenant qu’il nous faudra choisir entre les deux.

- Oui, c’est bien cela : pour être heureux il faut être insouciant. Voyez les jeunes : se soucient-ils de l’avenir quand ils font la teuf’ malgré la covid ? Les vieux ronchonnent : « Ces jeunes sont insouciants parce qu’ils sont imprévoyants. Oui, mais : ce n’est pas parce qu’ils ne savent pas ce qui va leur arriver que ça n’arrivera pas. » Faut-il renoncer à la lucidité sous prétexte de vivre heureux ?

Lorsqu’une catastrophe arrive qui est le mieux armé pour la subir :  l’homme prévoyant qui s’est longtemps usé à l’imaginer ou l’insouciant qui avait vécu bien tranquille comme si les jours heureux ne devaient jamais finir ?

« L'homme insoucieux, l'imprévoyant, est moins accablé et démonté par l'événement catastrophique que le prévoyant.

Pour l'imprévoyant, le minimum d'imprévu. - Quoi d'imprévu pour qui n'a rien prévu ? » - Paul Valéry / Tel Quel

lundi 10 mai 2021

Sémantique, quand tu nous tiens ! – Chronique du 11 mai 2021

Bonjour-bonjour

 

Pour l’amoureux de la langue française que je suis c’est un bonheur de voir les élus de la Nation se disputer autour du sens d’un mot à introduire dans la Constitution. S’agissant d’introduire la protection du climat dans la Constitution, faut-il dire que la France préserve l’environnement (comme le veut le sénat), ou bien qu’elle garantit sa préservation (formule proposée par l’exécutif) ?

Le garde des Sceaux Éric Dupond-Moretti jouant le rôle de sémanticien de service a « assumé » le choix du verbe « garantir », qui marque « la force de l'engagement » du gouvernement en faveur de l'environnement. Autre sémanticien, autre avis : M. Retailleau a vu dans la formulation du gouvernement l'« introduction du virus de la décroissance dans notre Constitution ».

Querelles sibyllines, qui nous font oublier l’essentiel – à savoir ce sur quoi porterait l’éventuelle protection ?  « Le PS s'est quant à lui focalisé, sans davantage de succès, sur l'idée d'introduire dans la Constitution la protection des "biens communs mondiaux", au rang desquels figurent le climat, l'eau, la santé... ou encore, thème d'actualité, les vaccins. » (Lire ici).

Pour faire bonne mesure, précisons que la formulation voulue par l’exécutif reprend les préconisations de la Convention citoyenne sur le climat (CCC) qu’on lui reproche d’avoir par ailleurs malmené. Du coup les sénateurs se sentent piégés en étant réduits soit à voter sur commande un texte qu’ils n’apprécient pas, soit d’être cantonnés dans « le rôle de méchant » (Hervé Marseille Président du groupe centriste).

 

… Je vous sens, chers amis pris de vertige, et que partis sur une définition de vocables, vous vous sentez perdus dans les chausse-trappes de la politique… Même le plus simple mot, qui désigne la chose la mieux définie qu’il soit, prend un autre sens dès lors qu’il peut servir à autre chose.

Et pourquoi pas ? Wilhelm Furtwängler, le célèbre chef d’orchestre disait : « les autres chefs jouent les notes ; moi je joue ce qu’il y a entre les notes ». Eh bien nos élus eux aussi veulent lire ce qu’il y a entre les mots. Faudrait-il leur reprocher d’être trop subtils ?

dimanche 9 mai 2021

La Marseillaise versus l’Internationale – Chronique du 10 mai

Bonjour-bonjour

 

Il n’y a pas que Napoléon dans les mémoires. Il y a la Commune de Paris aussi, puisque depuis le 18 mars la mairie de Paris célèbre les 150 ans de la Commune. Occasion d’entendre l’Internationale d’Eugène Pottier, composée à Paris en juin 1871 en pleine insurrection ; et qui depuis retentit à chaque fois que le peuple s’est soulevé contre ses oppresseurs.

« A chaque fois » ? Sûrement pas, car si en mai 68 l’Internationale était l’hymne des manifestants, depuis les épisodes des Gilets Jaunes, c’est plutôt la Marseillaise qui a retenti.

Étonnant changement, pour des gens également déterminés et également en lutte contre la brutalité du pouvoir : comment l’expliquer ?

- On peut comprendre déjà que l’Internationale, chant révolutionnaire, n’allait pas avec les revendications des Gilets : eux ce qu’ils voulaient c’était de la thune et rien d’autre. Pour cela, changer les hommes oui ; changer la nature du pouvoir non. Pourtant, à l’instar des communards, quelques-uns d’entre eux demandaient la démocratie directe donnant le pouvoir référendaire au peuple ; mais il s’agissait là d’une petite minorité fortement idéologisées, et à part eux personne ne voulait autre chose que la démission du gouvernement et de nouvelles élections.

Reste qu’on peut malgré tout s’étonner de l’omniprésence de la Marseillaise, chantée comme un mantra par les manifestants à chaque fois qu’il fallait défier les policiers ou quelque autorité légale. Par un curieux reversement, la Marseillaise rejetée par les manifestants de 68 comme hymne officiel d'un pouvoir despotique, est devenue, le temps des manifestations des Gilets Jaunes, la preuve de leur légitimité ; pour eux, chanter la marseillaise c’est dire : « C’est nous le peuple, et c’est à nous de dire la loi ! »

- On dégage ainsi une loi générale : jamais la Marseillaise et l’Internationale n’ont été chantées ensemble.

Pourtant il y a tout pour les réunir, à commencer par la nature des opprimés : ce sont dans les deux cas les pauvres écrasés par la misère et par des lois iniques. Dans les deux cas ils n’ont que des haillons pour les protéger, et que des sabots pour marcher. Dans les deux cas ce sont les femmes, opprimées parmi les opprimés qui lèvent d’étendard de la révolte :

 


J’ai bien essayé de fusionner ces deux hymnes, et ça a donné ça : Allons ! Enfants de la Patrie ! / Vous, les damnés de la terre / Vous les forçats de la faim / Entendez-vous dans les campagnes / Mugir ces féroces soldats ? / Le monde va changer de base : / Nous ne sommes rien, soyons tout !

C’est nul, évidemment ; déjà parce qu’on passe sans prévenir du « Vous » au « Nous » : si Rouget de l’Isle interpelle les citoyens en s’adressant à eux, Eugène Pottier se place au cœur de la classe des opprimés. Et puis surtout, si les uns sont en lutte contre un envahisseur étranger, les autres se soulèvent contre le pouvoir de leur propre pays. 

Mais de toute façon, à quoi bon chercher à réunir ce qui l’est déjà ? Oui, chacun de ces hymne a déjà été accaparé par un pouvoir despotique, oubliant le sens évident des paroles, délaissées au profit de la simple musique sur la quelle défilent les chars d’assauts aux Champs-Élysées et les troupes au pas de l’oie sur la Place Rouge.

samedi 8 mai 2021

Le tueur à trottinette – Chronique du 9 mai 2021

Bonjour-bonjour

 

Que faire le dimanche quand tout est confiné et que rien dans l’actualité mondiale ne nous interpelle ? Lire les faits divers, surtout quand ils ont une portée nationale. Ainsi de l’assassinat du policier par un trafiquant en pleine rue à Avignon, qui émeut l’opinion et le gouvernement. Et qu’apprend-t-on ? Que le meurtrier a pris la fuite à trottinette électrique ! (Et ce n’est pas un fait divers isolé, ainsi qu’en témoignent ces articles de presse ici et )

Aussitôt on pense à la bande à Bonnot célèbre il y a plus d’un siècle pour avoir utilisé l’automobile pour perpétrer ses forfaits – à une époque où la police se déplaçait principalement en vélo.

 

 

Voir et lire ici

Quand j’étais jeune je rêvais à ce que serait l’an 2000 : il nous apporterait une progrès hyper-technologique, avec des avions pour se déplacer dans les rues des grandes villes – parce que, bien sûr, après l’automobile, on ne pourrait progresser qu’en utilisant la voie aérienne.

Et qui donc aurait imaginé à l’époque que la trottinette, le joujou des enfants, gagnerait le challenge pour devenir le moyen de déplacement le plus efficace dans la compétition entre les « nouvelles mobilités » ? Ni le Segway, ni l’Hoverboard n’ont pu s’imposer devant ce redoutable concurrent, sans danger pour l’utilisateur et assez maniable pour permettre de semer les agents de la BAC. Bien qu’encore un peu lourd et un peu cher, voilà donc l’engin au quel nos villes vont devoir s’adapter dans les toutes prochaines années.

Pour qui a vu le chaos semé dans les grandes villes par ces engins en libre-service le défi est de taille.

vendredi 7 mai 2021

Un air de vacances ? – Chronique du 8 mai 2021

Bonjour-bonjour

 

Alors que le retour de l’été et les promesses de déconfinement se confirment, le Conseil scientifique craint une quatrième vague de contamination en France. Et de menacer : si nous nous précipitons pour retrouver la vie d’avant, voilà ce qui risque de nous arriver :

 

Vu ici

 

J’avoue que cette image m’a glacé le sang. Voir cette femme isolée dans un carré délimité par des cordes comme les animaux de fermes au Salon de l’agriculture, c’est purement effrayant. Et pourtant, c’est notre condition depuis plus d’un an ; que ce soit par peur ou par espérance peu importe, c’est ce que nous avons accepté. Et c’est le fait de nous être résignés à cela qui fait peur, encore plus que le risque de devoir rester cloitrés encore 6 mois.

- Rappelons-nous de février 2020 : les images venues de Chine montrent les rues de la ville de Wuhan désertes, la population, qui compte rappelons-le onze millions d’habitants – autant que la Belgique – entièrement confinés, personne sur les trottoirs, personne dans les magasins (d’ailleurs fermés), pas une voiture, pas un tram. Et nous de dire : « Voilà bien les chinois ! Jamais nous n’accepterions ça – c’est sûr ! » Pourtant, en France, un mois plus tard, on ne trouvait plus dans les rues que de passants furtifs hâtant le pas vers la boulangerie pendant que des élus de tous bords réclamaient la démission du gouvernement incapable de fournir masques et gel hydroalcoolique.

Et aujourd’hui ? Sommes-nous redevenus les fiers enfants de la Révolution qui clament « La liberté ou la mort ? » et qui défient le pouvoir en manifestant sans masque ? Eh bien non ! Et la peur de la maladie est telle que nous voyons tous ces gens, récalcitrants au vaccin hier, assiéger aujourd’hui Doctolib pour obtenir une date pour se faire vacciner.

Perdre sa liberté n’est rien si c’est la condition pour rester en vie. Je dirai même plus : nous sommes prêts à jeter nos valeurs morales aux orties si ça nous permet de rester sains et saufs de la maladie. Si vous ne me croyez pas, cherchez des infos sur d’éventuelles manifestations réclamant que l’Europe envoie des doses pour vacciner les pays pauvres – oui, des doses prélevées sur le stock qui nous étaient destiné.

- Quoi ? Nous priver de vaccins pour sauver des africains ? Ça va pas non !!!

jeudi 6 mai 2021

Faut-il déboulonner Napoléon ? – Chronique du 7 mai 2021

Bonjour-bonjour

 

L’actualité nous invite à méditer sur l’intérêt de l’histoire, non pas ce passé qui fut le nôtre et qui nous interpelle, mais bien cette science qui se consacre à son étude. Il s’agit bien sûr du débat concernant la commémoration du bicentenaire de la mort de Napoléon qui nous intéresse. Pour les uns il faut condamner les méfaits de l’Empereur comme s’il les commettait aujourd’hui – et on pense d’abord au rétablissement de l’esclavage. Pour les autres aucun jugement ne peut être formulé aujourd’hui à propos des évènements historiques sauf à s’en tenir à ceux qui tiennent compte de l’époque. 

Cette question a été abordée par le discours présidentiel : je ne doute pas que le Président si attaché à trouver le point d’ancrage de la nation que sont nos héros ait eu l’intention de montrer que le passé et le présent – mais aussi l’avenir – se retrouvent et se complètent dans la mémoire de Napoléon. Seulement, pour être un idéal encore aujourd’hui, il doit être lavé des impuretés qui le souillent – comme le rétablissement de l’esclavage ou la tyrannie à l’encontre des intellectuels, ou encore la soumission des femmes à leur mari.

Il s’agit de politique ou d’idéologie – mais pas seulement : la question du jugement porté sur l’Empire est vraiment l’occasion de s’interroger sur l’intérêt de l’histoire comme science.

 

Et du coup ressurgit la question : à quoi bon faire de l’histoire ?

… « Papa, explique-moi donc à quoi sert l’histoire ? » : c’est par cette question posée par son propre fils que Marc Bloch ouvrait son livre « Apologie pour l’histoire – ou : le métier d’historien ». C’est sans dissimuler aucune des difficultés du métier d’historien – et le lecteur des livres d’histoire en est déjà un – que Marc Bloch apporte la lumière indispensable pour comprendre l’enjeu véritable de ce débat, qui, s’il ne concernait que le déboulonnage de quelques statues, n’aurait que peu d’intérêt.

Refusant de considérer l’historien comme un antiquaire qui ne s’intéresserait au passé que pour le passé ; mais estimant par contre que les différences entre lui et nous ne sont pas de véritables ruptures, le livre posthume de Marc Bloch peut être rouvert aujourd’hui pour nous aider à comprendre non pas s’il faut commémorer ou pas Napoléon, mais de quelle façon il convient de le faire.

Le plus motivés pourront télécharger le livre de Marc Bloch ici.

Les moins énergiques pourront lire un compte-rendu ici.

Quand le devoir et l’intérêt se confondent – Chronique du 7 mai 2021

Bonjour-bonjour

 

Tempête sur les labos pharmaceutiques : après Washington, l'UE déclare être « prête à discuter » de la levée des brevets des vaccins contre la Covid-19. Et ce n’est pas tout : Cécile Duflot, la directrice générale d’Oxfam France a signé un "appel de Paris" le 11 mars dernier pour "libérer la production des vaccins". Le texte demandait la réquisition des outils de production et la levée des brevets en suspendant temporairement les Accords sur les aspects des droits de propriété intellectuelle qui touchent au commerce (ADPIC). (Lu ici)

Voilà des propositions révolutionnaire qui fleurent bon la sédition marxiste : ce qu’il faut réquisitionner, ce n’est pas seulement la matière grise, mais aussi les lignes de production et tout ce qui va avec. Quand on voit que les États-Unis se déclarent prêt à imposer cela, et que l’Union Européenne (moins l’Allemagne il est vrai) en accepte le principe, on se dit que les valeurs humanitaires ont d’un seul coup pris une incroyable autorité !


Peut-être… ou peut-être pas. Car voyons de plus près les informations – par exemple celle-ci : « Aux Seychelles : malgré 60% de vaccinés, le pays se reconfine

Depuis des mois, le monde mise tout sur le vaccin pour revenir à la vie normale, mais ça pourrait ne pas suffire. Les Seychelles, pays le plus avancé du monde sur la vaccination, avec 60% d’habitants vaccinés, viennent d’annoncer leur reconfinement face à une nouvelle vague de contaminations. 45% des contaminés ont été entièrement vaccinés, principalement au vaccin chinois et à l’Astrazeneca. » (Lu ici

On pourrait se dire : pourquoi se battre pour diffuser la vaccination, puisqu’elle est inefficace ? Mais ensuite, lisant de plus près la dépêche on constate que le virus concerné est le variant indien et que les vaccins utilisés (Sinopharm, le vaccin chinois et Astrazeneca) ne sont pas les plus efficaces face à lui. On dira : diffusons donc principalement les brevets de Pfizer et de Moderna, et voilà tout.


- Mais surtout, ce qui se passe aux Seychelles et qui implique le variant indien est un terrible avertissement : si nous laissons se développer le virus jusqu’à ce qu’il atteigne une masse critique, il va produire des variants devant lesquels nous serons impuissants. Il est non seulement de notre devoir de protéger nos frères humains, mais encore de notre intérêt bien pensé d’empêcher le virus de les infester au risque de produire des mutations pathogènes pour nous aussi. 

mercredi 5 mai 2021

Les faits sont complètement démentis par mon opinion – Chronique du 6 mai 2021

Bonjour-bonjour

 

Vu à la télé hier soir Xavier Gorce, le dessinateur de presse viré par le Monde il y a peu et auteur de la série « Les Indégivrables », qui nous montre son pingouin défenseur de fake news :

 


 

Voilà donc les deux règles qui dominent aujourd’hui : 1° L’opinion est la vérité ; 2° Ce qui s’oppose à l’opinion non seulement est faux mais participe aussi aux ruses d’un complot.

- Voyons d’abord la première affirmation : toute vérité coïncide obligatoirement avec l’opinion, qui est je suppose ici une manière d’éprouver une réalité quelconque (1). Si je ressens qu’il fait chaud alors il fait chaud, quoiqu’en dise mon voisin et les bulletins météo qui annoncent le froid sont mensongers. On est ici en plein dans le relativisme tel que Théétète le décrivait sous la plume de Platon : « il me paraît que celui qui sait une chose sent ce qu’il sait et, autant que j’en puis juger en ce moment la science n’est autre chose que la sensation. » (Théétète – 151e). Telle est ma sensation, telles sont les choses: notre Pingouin frileux ne dit pas autre chose.

- Et la réciproque (à savoir que ce qui s’oppose à l’opinion est forcément une tromperie abusive) : il y a quelque temps un jeune cadre du Rassemblement National (il s’agit de Jordan Bardella) était confronté à une journaliste qui l’interviewait à propos d’un texte de loi qu’il critiquait pour un article particulier. La journaliste « Mais cet article n’existe pas dans le texte, monsieur Bardella. » Réponse : « Ça, c’est votre opinion, et ce n’est pas parce que vous êtes journaliste que votre opinion est supérieure à la miennes. »

Xavier Gorce ne doit pas chercher longtemps ses comics stripes de pingouins : les actualités les donnent toute faites.

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(1) "Une opinion est un avis, un jugement personnel que l'on s'est forgé sur une question ou un sujet en discussion qui ne relève pas de la connaissance rationnelle. L'opinion, même si elle est affirmée avec conviction, est un jugement qui n'est pas nécessairement juste." La Toupie

mardi 4 mai 2021

Passeport vaccinal – Chronique du 5 mai 2021

Bonjour-bonjour

 

L’idée de passeport vaccinal qui présente l’inconvénient de priver certains citoyens de leurs droits de se déplacer et d’entrer dans certains lieux alors que d’autres le pourraient fait polémique en France : les autorités déclarent avec emphase qu’il n’est pas question d’une pareille entorse aux droits fondamentaux des personnes, mais on voit aussi que, de façon détournée, ils laissent entendre que ça serait quand même possible.

Il faudrait consulter des spécialistes de la constitution pour dire si ces mesures sont conformes à nos principes fondamentaux, mais on peut aussi regarder chez nos voisins qui ont déjà pris de pareilles mesures comment elles se justifient.

Par exemple l’Allemagne dont on nous dit qu’elle va lever plusieurs restrictions pour les personnes vaccinées : « Les personnes vaccinées n’auront plus besoin d’un test négatif si elles veulent faire des courses, aller chez le coiffeur ou visiter un jardin botanique. Elles pourront aussi se rencontrer en privé sans restriction. Le couvre-feu nocturne récemment instauré à partir de 22h00 ne s’appliquera plus non plus aux personnes ayant reçu deux doses de vaccin. » a déclaré (ici) Christine Lambrecht ministre de la justice.

Voilà donc les faits : maintenant, comment justifie-t-on l’exception qu’ils constituent par rapports aux autres citoyens, ceux qui ne sont pas inoculés ? Écoutons encore la ministre de la justice d’Allemagne : « Nous avons dû restreindre les droits fondamentaux durant la crise sanitaire pour protéger la vie et la santé. Cela a été extrêmement douloureux pour moi en tant que ministre de la Justice. J’ai aussi toujours dit que les droits fondamentaux devaient être rétablis dès lors que leur restriction n’était plus justifiée » (Réf. Ci-dessus)

Autrement dit : il ne faut pas voir dans ces mesures des privilèges accordés à certains et refusés à d’autres, mais au contraire, la levée de restrictions exceptionnellement et légalement consenties en raison de la gravité du danger. Cette interprétation serait également valable pour nous, en France, sous conditions que ce passeport vaccinal soit concomitant avec l’état d’urgence sanitaire. 

Certains vont hausser les épaules et dire qu’on fait de la com’ et rien d’autre. Mais ils auraient tort : ce qu’on énonce ici c’est un principe – à savoir que rétablir des libertés même progressivement, même sans que tous puissent en bénéficier, n’est pas illégal. Rétablir la liberté, ce n’est pas forcément en même temps que tout le monde pourra en jouir, mais seulement que ceux qui en seront empêchés ne doivent pas l’être par un acte arbitraire mais seulement par un fait naturel.

Par exemple, ne pas être vacciné est un fait « naturel » tant qu’on n’en a pas été empêché par une décision arbitraire.