samedi 22 décembre 2018

EN SUISSE, PERSONNE NE REMET EN CAUSE LES VOTATIONS CITOYENNES.

Entretien avec Antoine Chollet, politologue à l'université de Lausanne (Lu ici) :
Qui utilise la demande de référendum ?
Ce sont des groupes de citoyens parce qu’il ne faut qu’un nombre de signatures assez faible. Au niveau fédéral c'est 1% des électeurs pour les référendums contre une loi et 2% pour les initiatives qui en proposent soit 50.000 et 100.000 signatures ; si on augmentait le nombre de signatures, ça pourrait déboucher sur un système à la californienne où des milliardaires lancent des référendums en payant les personnes qui recueillent les signatures mais aussi ceux qui signent. Vous avez les signatures en un temps record mais c'est un dévoiement de l'outil.
Y a-t-il une frénésie de référendums ?
Non, car il est à double tranchant. Si vous lancez un référendum contre une loi votée et que vous le perdez largement, cela peut sur-légitimer la loi. Pour l'initiative, c'est la même chose, si vous êtes largement battus, l'effet est dévastateur.
Quelle place accorder au référendum dans la vie politique des citoyens ?
La grande différence entre sondage et référendum c'est que pour ce dernier, il y a une campagne durant laquelle tous les arguments sont rappelés …

Arrêtons  cette lecture pour réfléchir à ce fait : les sondages d’opinion qui jouent un rôle si fréquent et si délétère dans  notre démocratie, seraient sans doute mis à l’écart au profit des « votations » si l’on écoutait ces propos au sujet des référendums d’initiative citoyenne en Helvétie. Or ceux-ci sont parfaitement compatibles avec la démocratie, dans la mesure où ils présupposent un débat public, ce que bien sûr ne supposent pas les sondages, fort opaques dans leur élaboration (panel ou bien internautes de passage ?), et susceptibles de réagir à des émotions, ce qui implique leur très grande versatilité. Or, en matière politique, les revirements sont fort coûteux ; pour en être persuadé, il n’est que de voir l’actuel mouvement des gilets-jaunes qui comptent dans leurs rangs bien des électeurs de la République en marche.

- Qu’importe le moyen utilisé pour consulter la « volonté » populaire : lorsqu’on réagit émotionnellement qu’importe comment on fait savoir son opinion ?
Toutefois, réfléchissons en darwinien sérieux : l’émotion a accompagné l’évolution de l’espèce depuis des millions d’années et on peut penser qu’elle était là avant même que le néocortex frontal soit apparu, avec ses capacités cognitives hors normes.
A quoi bon l’émotion ? C’est simple : lors des jacqueries médiévales, point n’était besoin d’attendre la négociation avec le seigneur du château. Les Jacques fulminant de fureur empoignent la fourche et, hardi-petit, ils vont piquer le châtelain : à  ce moment-là, les émotions stimulent la production d’adrénaline et la violence jaillit d’elle-même. On dit que l’espèce humaine a conquis la  suprématie sur les autres espèces grâce à ses facultés d’entente sociale et de coopération. Oui : entente et coopération pour ratatiner le voisin afin de s’emparer de ses femmes et de ses réserves alimentaires.

Et aujourd’hui ?

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