Les représentants du collectif « gilets jaunes libres », qui
ont appelé dimanche à une « sortie de crise », n’iront pas discuter à Matignon
mardi. « Nous n’irons pas pour trois raisons, a expliqué au Monde Benjamin
Cauchy, l’un des signataires de la tribune appelant à renouer le dialogue avec
le gouvernement dans Le Journal du dimanche. D’abord, nous avions demandé un
geste fort avant d’y aller : le gel des hausses des taxes sur les carburants.
Nous ne l’obtiendrons pas. Ensuite, nous ne souhaitons pas être des
marionnettes d’hommes politiques qui vont nous faire encore de la pédagogie. Et
c’est ce qu’annoncent tous les éléments de langage des députés LRM entendus
dans les médias depuis ce matin. » Lire ici
Faire
de la pédagogie : c’est avec cette formule magique que
tous les responsables de l’exécutif expliquent et excusent l’échec de leurs
projets de réformes : « Nous n’avons fait assez de pédagogie, il faut
en reprendre l’effort ». Comme si la résistance du peuple à leur décision
ne pouvait venir que d’esprits embourbés dans l’erreur et les préjugés. Car
pour faire de la pédagogie, il faut d’abord détenir la vérité, et ensuite la
faire circuler. Or la vérité n’est pas toujours évidente particulièrement
lorsqu’elle consiste à montrer le juste rapport entre une taxe qu’on impose et
le bénéfice que les taxés en tireront – on aura apprécié ma modération, à moins qu’on ne l’ait prise pour une ironie.
Mais les membres du collectif « Gilets jaunes
libres » ne sont pas dupes : les « pédagogues » cherchent
en réalité à faire de leurs pseudo-élèves des marionnettes bien dociles à leurs
propos. S’agit-il de critiquer ici des sophistes qui endorment les citoyens en
flattant leurs fantasmes ? Pas seulement : car celui qui fait de la
pédagogie prétend en réalité posséder la vérité que seuls les préjugés et les
passions empêchent de reconnaitre. Faire de la pédagogie en politique c’est
présupposer que la politique soit une science, que son objet soit parfaitement
défini, analysable et ses évolutions anticipables. Or il n’en va pas ainsi, et
rien n’est écrit à l’avance. Que l’opinion publique ait résisté aux appels à la
grève, au blocage du pays dans de très nombreuses circonstances, que les
syndicats, les partis politiques, aient échoué à enclencher la convergence des
luttes, et que là dessus le mouvement des gilet jaunes leur soit tombé sur le
dos sans qu’ils l’aient vu venir (pas plus que le gouvernement) montre bien qu’en
la matière rien ne soit écrit d’avance, ce que prétendent indument les
pédagogues de l’exécutif.
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