dimanche 1 janvier 2023

L’âge de la falsification – Chronique du 2 janvier

Bonjour-bonjour

 

Que retenir ce matin qui puisse servir de repère dans l’actualité de ce début d’année ? Quelle est cette info qui s’inscrit dans une continuité pour faire sens, mais qui montre aussi une nouvelle direction qui institue une rupture significative ?

 

- Tout compte fait j’ai retenu celle-ci : « Vaisselle réutilisable dans les fast-food à partir de ce dimanche » (lu ici)

Désormais votre McDo devra vous servir dans des boites réutilisables, donc susceptibles de passer au lave-vaisselle : c’est d’ailleurs tout ce qui importe et fait souci aux exploitants : « C'est forcément une contrainte supplémentaire » déplorent-ils.

On peut estimer que tout ça c’est « peanut » par rapport aux tombereaux d’objets jetables, emballages, et autres gobelets des machines à café consommés chaque jour – surtout si on ajoute à tout cela le nombre de bouteilles d’eau jetables consommées également chaque jour. Mais si les enseignes de fastfood s’y mettent c’est quand même une rupture.

 

- En quoi cette rupture consiste-t-elle ? 

C’est que l’on est entrain tout doucement de détricoter les mécanismes mis en place par la société de consommation pour accélérer la consommation de tout ce qui peut se vendre.

La consommation se définit par un usage qui détruit le consommable : le morceau de pain est consommé lorsqu’il finit dans un estomac : sa fonction nutritive est concomitante avec sa métabolisation. 

- Bien sûr tout ce que l’on utilise n’est pas intégralement consommé : si la confiture est mangée, le pot en verre reste encore réutilisable – du moins tant qu’il n’est pas cassé. Or, s’il est vrai que « Tant va la cruche à l’eau qu’à la fin elle se casse », ça peut quand même demander un bout de temps.

- Notre société du « tout jetable » a su remplacer le réutilisable par sa destruction grâce à l’obsolescence programmée ; certes ce n’est pas nouveau et le procédé est déjà dénoncé en 1880 par Paul Lafargue dans son pamphlet de « Le droit à la paresse » (1). Mais voilà qu’aujourd’hui on veut faire le chemin en sens inverse : des consignes pour récupérer nos pots de confiture ? Oui, et tant pis si ça prive l’industrie d’une production lucrative : on mettra ces usines à la fabrication de pots de yaourts recyclable.

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(1) Paul Lafargue est à ma connaissance le premier à dénoncer la société de consommation comme celle qui a mis en place « l’âge de la falsification » 

Tous les écoliers devraient avoir appris par cœur ce texte de Lafargue : « Dans nos départements lainiers, on effiloche les chiffons souillés et à demi pourris, on en fait des draps dits de "renaissance", qui durent ce que durent les promesses électorales ; à Lyon, au lieu de laisser à la fibre soyeuse sa simplicité et sa souplesse naturelle, on la surcharge de sels minéraux qui, en lui ajoutant du poids, la rendent friable et de peu d'usage. Tous nos produits sont adultérés pour en faciliter l'écoulement et en abréger l'existence. Notre époque sera appelée l'"âge de la falsification", comme les premières époques de l'humanité ont reçu les noms d'"âge de pierre", d'"âge de bronze", du caractère de leur production. » (Paul Lafargue – Droit à la paresse 1880 – à télécharger ici)

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