Bonjour-bonjour
Vous en voulez du bonheur ? Oui, mais vous ne savez pas où en trouver ? Demandez aux acteurs de l’Odéon : vous en vendre – ou plutôt : vous en donner – ils ne demandent que ça.
C’est du moins ce que je lis ce matin dans la presse : « Une cinquantaine d’intermittents et de manifestants de la CGT ont investi le théâtre de l’Odéon. Ils chantent : « Laissez-nous travailler, on veut rendre les gens heureux. »
Ces acteurs chantent ces paroles sur un rythme caribéen ( ? = vérifiez ici) :
Laissez-nous travailler / On veut rendre les gens heureux / Laissez-les respirer / Le bonheur est contagieux / Laissez-nous travailler / On veut rendre les gens heureux / On veut voir se rallumer / Les étoiles dans les yeux
Je devine que vous allez avoir dans la cervelle durant tout le week-end cet air et ces paroles : inutile de me remercier, c'est à eux, les acteurs de la vie culturelle, qu’il faut adresser vos remerciements.
Quant à moi, je constate avec plaisir que se comble le fossé que certains voudraient creuser entre la « génération 68 » et les jeunes qui ont la malchance d’avoir 20 ans en 2020. Car cette chanson dénonce la situation qui contraint à ne bouger et à n’agir que pour aller travailler, interdisant impitoyablement tout ce qui ressemble à des loisirs. Vivre, disait Freud, c’est aimer et travailler. Aujourd’hui on ne peut plus jouir de la vie, mais seulement s’éreinter dans le labeur : cette volonté de censurer le plaisir est tel qu’on va n’interdire, comme le dit cette chanson, que le travail qui donne du bonheur – c’est-à-dire des loisirs. « Bossez toute la semaine et confinez-vous le w-e ». Or voilà bien ce qu’on dénonçait, nous autres soixante-huitards avec Herbert Marcuse, qui analysait dans l’homme unidimensionnel le conditionnement des travailleurs contraints de produire industriellement des biens et à les consommer en masse – et rien de plus.
Il est vrai que le livre de Marcuse se terminait sur cette citation de W. Benjamin : « C'est seulement à cause de ceux qui sont sans espoir que l'espoir nous est donné ». Et si la covid sonnait le réveil du besoin vital de création ? Si la privation de spectacle revitalisait le besoin de ciné et de théâtre ?
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