vendredi 1 janvier 2021

Les nouveaux prix de vertu – Chronique du 2 janvier

(Le 31 décembre le président Macron a célébré des comportements particulièrement vertueux s’apprête-t-il à restaurer les « Prix de vertu » de l’Académie Française ? – voir ici)

 

Bonjour-bonjour

Hier, 1er janvier, vous avez souhaité plein de « bonnes choses » à vos parents, amis et relations. Mais avez-vous songé à quoi cela engageait ? Écoutez un peu cet avis éclairé : « Je n'arrive plus à souhaiter aux gens une heureuse année. Pas quand je songe à ce qui les rendrait vraiment heureux. » dit Gerald F. Lieberman (1)

Voilà : il vous en faut plus ? Alors, écoutez Racine qui disait déjà dans Phèdre : : « Craignez, seigneur, craignez que le ciel rigoureux / Ne vous haïsse assez pour exaucer vos vœux ! » Phèdre (Acte V, Scène 3) Et dans un passé encore plus lointain : « Il ne serait pas meilleur pour les hommes que tous leurs vœux soient accomplis. » Héraclite Fragments 110

 

- Repentez-vous mes frères pour les vœux que vous avez distribués hier de façon irréfléchie ; et abstenez-vous d’en faire encore d’autres aujourd’hui. Car : oui, il faut savoir à quoi nous faisons appel quand nous souhaitons aux autres le bonheur, la réussite, le triomphe de leurs désirs. Imaginez un instant que vous soyez le 1er janvier 1933, votre ami s’appelle Adolf Hitler : vous lui souhaitez la réussite bien sûr…

 

Faisons donc bien attention à qui nous souhaitons le succès. Mais que dire de ce que nous nous souhaitons à nous-mêmes ? Car pour avoir tout ce qui ferait notre bonheur ou qui nous permettrait de jouir de la vie, ne serions-nous pas exposés à faire le malheur de quelques-uns de nos semblables ? Non, pas forcément : rappelez-vous la litanie des héros du quotidien égrenée par Emmanuel Macron dans son allocution du 31 décembre : toutes ces Marie-Corentine, infirmière ; ces Jean-Luc, Anthony et Maxime, chauffeurs éboueurs en Guyane ; et puis Gérald, entrepreneur près d'Angers ; et le petit Lucas, 11 ans, qui a fait don de sa tablette à des personnes âgées malades et isolées ; ou encore Romain, gendarme à Tende. Tous ces prix-de-vertus nous ont montré la voie en montrant qu'on peut ne pas penser à soi-même avant de penser aux autres. 

Voilà donc ce que vous devez me souhaiter : savoir m’oublier moi-même – et donc de savoir aimer les autres ? Il faudrait donc devenir un saint pour mériter l’estime de nos contemporains ? Nos héros du quotidien distingués par le discours présidentiel pour nous montrer la voie n’en sont pas nécessairement là, mais ils n’en déméritent pas pour autant : il suffit de donner sans que ce soit dans le but de recevoir en échange.

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(1) Gerald F. Lieberman qui était un “freelance writer”, mort en 1996 selon cet article du New York Times

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