Parmi les victimes Pierre-Emmanuel Germain-Thill, abusé pour la première fois à l’âge de 10 ans en 1989. « Au fil du temps, il est allé plus loin. Ces gestes étaient de plus en plus appuyés, se souvient-il. Il me caressait le sexe d’un mouvement circulaire de la main ». Au total, une « cinquantaine de fois » en quasiment trois ans, évoque le jeune homme.
L’ancien curé demande pardon mais revient progressivement sur les faits qu’il a reconnus en garde à vue. Les baisers imposés sur la bouche ? « Non, ce n’était pas ma méthode. Je ne mettais pas la langue », insiste-t-il à plusieurs reprises, faisant état de « bisous sur les yeux ou les sourcils ». Des mains passées dans les slips ? « Seulement » sur le corps ou les cuisses, répond-il à certaines victimes. Des demandes de masturbation ? « Pas pour lui ».
Il y a également les caresses imposées à la vue de tous dans les cars ramenant les scouts de leur séjour à la montagne ou à l’étranger.
« Je vous accorde qu’il n’y a pas eu de dénonciation pour des faits datant d’après 1991 mais l’analyse que vous livrez sur votre volonté est un peu… limite », relève la vice-procureure, Dominique Sauve.
- On a bien lu : les caresses pendant les déplacements des scouts étaient vues de tous : personne n’en a parlé. Était-ce tellement habituel donc normal ?
En tout cas on constate que ça a duré 20 ans, que ça se passait il y a maintenant presque 50 ans, et que durant tout ce temps, rien ne s’est ébruité. Je dis : ébruité pour montrer qu’on savait mais qu’on n’en parlait pas au-delà d’un cercle très restreint de familiers. La respectabilité d’un prêtre doublée de l’autorité personnelle de celui-ci a suffi à imposer le silence à tous, y compris aux parents.
Quand on ajoute à tout cela la bienveillante tolérance durant toute cette période concernant les agissements de Gabriel Matzneff, on comprend que la criminalisation de la sexualité n’était alors pas du tout ce qu’elle est devenue aujourd’hui. On en était arrivé à penser que des actes sexuels prédateurs ça n’existait "presque" pas (sauf viols avérés biens sûr) et que la participation à de tels ébats ne pouvait pas faire de mal, sous réserve que le consentement soit acquis.
Irons-nous jusqu’à dire que l’on pensait que leur interdiction ferait plus de mal que leur tolérance ?
A l’aune de quelle justice va-t-on condamner le père Preynat ? De celle qui a tenu pour vénielle les fautes de Gabriel Matzneff ? Ou de #metoo ? On ne se pose pas la question car on pense toujours que la justice est unique et universelle, intemporelle même.
En tout cas, à la barre Bernard Preynat se repent mais ne fléchit pas : « Je n’ai jamais recommencé ».
Cela suffira-t-il pour l’absoudre ?
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