Journal d’un vieux confiné – 8 avril 2020

Devant la banalité des infos et durant toute la période de confinement, je remplacerai mes commentaires par ce journal.

Bonjour-Bonjour

Ce matin de bonne heure, à peine réveillé, la radio me glisse dans l’oreille une drôle de formule : l’intervention de la BCE correspondrait à une opération appelée distribution « d’argent hélicoptère » ce qui est une déformation de cette autre formule mieux attestée : « la monnaie hélicoptère ». 

« Le concept de monnaie hélicoptère a été défini pour la première fois par l’économiste américain  Milton Friedman. Il y développait une métaphore : les autorités monétaires impriment des billets et les jettent d’un hélicoptère dans les rues. Les gens les ramassent et les dépensent, ce qui permet de faire repartir l’inflation en territoire positif. » explique-t-on ici.  

Si j’ai bien compris l’idée est de raccourcir le circuit financier entre la production d’argent et sa mise dans le circuit économique. Elle est aussi de désigner le recours de la planche à billet, façon de remplir sans douleur l’hélicoptère et également d’alimenter l’inflation – but final de l’opération.

Et aujourd’hui ?

1 – La production de la manne est déjà en place. Un peu comme lors de la crise des subprimes avec Mario Draghi, on apprend que la BCE (mais aussi la réserve fédérale américaine) se propose « d’injecter » 1500 milliards d’euros dans l’économie européenne, partie pour renflouer les entreprises et maintenir le niveau économique des populations, partie pour financer des grands projets susceptibles de relancer l’économie. Bien entendu cette masse monétaire devra être créée sans ponctionner dans les coffres ; elle supposera la mise en service de la « planche à billets ». Comme cette formule « planche à billets » est très désagréable à l’oreille des financiers, on parlera plutôt de rachat de dette, selon des mécanismes fort compliqués à comprendre pour les cerveaux cartésiens (voir ici). Le public quant à lui parle tout simplement d’argent magique, (comme si ça simplifiait les choses !)

2 – Maintenant, l’hélicoptère, que vient-il faire ici ? Eh bien, l’idée dans cette distribution d’argent qui voltige dans les airs avant de tomber dans des mains anonymes, c’est que les détenteurs de ces sommes n’auront pas à les rembourser. Oui, ces sommes d’argent que certains d’entre vous vont recevoir à titre de compensation pour ce travail empêché, ces commerces fermés, ces voyages non faits, tout cela sera (est déjà) compensé par l’État, sans que vous soyez amenés à rembourser ces sommes (même le montant des charges sur lesquelles on obtient pour le moment seulement des délais, sera sans doute rayé du livre de la dette). Mais n’est-ce pas reculer pour mieux sauter : cette dette, l’État devra bien la rembourser – et avec quel argent ? Celui de nos impôts ? Mais non : l’État ne remboursera rien du tout, puisque cet argent est distribué pour cela par la BCE.

Ce serait donc un don gratuit ? On ne va pas nous couillonner (sic) en le récupérant d’une façon ou d’une autre un peu plus tard ? Je vois que certains se méfient et ne croient pas à la philanthropie des milieux de la finance. Et ils ont raison, mais ça ne change pour une fois rien du tout à ce qui va se passer. Parce que cet « argent hélicoptère » a pour fonction de maintenir à flot l’économie réelle et qu’en le dépensant pour remplir votre réfrigérateur vous faites exactement ce qu’on espère de vous. N’allez surtout pas prendre la bêche pour l’enterrer au fond du jardin !