samedi 11 avril 2020

De la vertu salvifique de la Place Saint-Pierre de Rome

Aujourd’hui, jour de Pâques, le Pape va célébrer la messe pascale seul sur la place Saint-Pierre à Rome. Le symbole est violent de voir cet homme, silhouette fragile dans sa soutane blanche, face au vide alors que le décorum voulu pour cette célébration est grandiose :



La messe de la résurrection en 2017
Alors on se dit : pourquoi maintenir cette messe dans une telle situation ? Pourquoi ne pas l’avoir purement et simplement supprimée, remplacée par une messe confinée dans une humble chapelle et transmise par la télévision ? Pourquoi maintenir ce décorum, ces estrades vides et cet espace sans rien ni personne ? La messe est de toute façon un symbole et si Dieu est touché par les prières des hommes, peut-on croire que le décor y soit pour quelque chose ?
Sans doute. Mais les exemples abondent qui montrent que la croyance dans la valeur du symbolisant pour atteindre le symbolisé est permanente.
- Comme avec cette armée de terre de l’empereur Qin, faite de statues à taille normale dotées d’armes véritables, et de chevaux de terre. Toute cette armée est sensée s’animer dans l’autre monde pour protéger l’empereur aussi bien que s’il était resté sur terre, avec de vrais soldats. Sans doute croyait-on que de simples images n’auraient pas suffi à le protéger.
- L’exemple encore plus évident est celui des pharaons égyptiens dont la momie était environnée de mobilier comprenant tout ce dont il devait avoir besoin dans l’autre monde qu’on imaginait sensiblement identique à celui où nous vivons. Là encore, une présence matérielle de ces symboles était la condition de leur efficacité. Le représentant doit être aussi proche que possible du représenté, et ça a toujours été comme cela, si on en croit les chevaux ou les chiens – quand ce n’étaient pas des femmes – enterrés avec la dépouille du seigneur.

Alors nous qui sommes fou de numérique et de virtuel, comment allons-nous vivre ces fêtes pascales, confinés que nous sommes dans nos petits logements, avec nos petits écrans ? Allons-nous suivre la messe de Rome sur nos Smartphones, ou bien estimerons-nous qu’une telle sacralisation nécessitera l’écran 65 pouces du salon ? Oui, sans doute, tant il est vrai que la machine à produire les symboles l’emporte aujourd’hui sur les symboles eux-mêmes.

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