jeudi 23 avril 2020

La mort n’est pas un concept : c’est une convulsion des tripes. – Chronique du 24 avril 2020

Bonjour-Bonjour

Quand le Président Macron a déclaré qu’on était en guerre dans un de ses premiers discours consacré au coronavirus, on l’a vertement critiqué, parce que cette « rhétorique guerrière » n’était pas de circonstance, l’heure étant plutôt aux câlins.
Et puis chemin faisant, nous apprécions certes les câlins mais nous observons aussi qu’ils ne suffisent pas à représenter ce que nous éprouvons.
En témoigne ce sentiment (ou plutôt cette sensation ?) que nous ressentons lorsque la mort s’approche de nous. Quand on veut faire de la rhétorique, la mort est un objet bien pratique : on peut se donner beaucoup d’importance et beaucoup de gravité en en parlant. « Il faut l’accepter comme liée à la vie » ; « elle est son horizon » ; « nous devons le considérer comme ce qui donne du sel à l’existence » ; ou encore « profiter de cet « en-deçà » de la mort pour songer à ce que fut notre vie »…
J’en ai des kilomètres comme ça, des propos qui ne nous engagent pas plus que l’instant où ils sont proférés. Par contre, si la mort vient frapper tout près de vous, un peu comme (j’imagine) en temps de guerre avec l’obus qui volatilise le soldat voisin, alors la mort ce n’est plus un concept : c’est une convulsion des tripes.
Ça c’est justement ce qui se passe à la guerre. Mais aujourd’hui, en temps de covid’ c’est aussi ce qui vous arrive lorsque votre voisin vous annonce que sa grand-mère est morte emportée par la maladie en l’espace d’une heure et demie, alors qu’elle allait plutôt bien le matin. « Vieille femme, elle n’avait plus grand-chose à attendre de la vie » ? Ou alors, « à 89 ans (c’était son âge) sa vie n’était plus qu’une flamme vacillante sur une chandelle consumée » ?
La rhétorique revient vite fait, mais là elle peut repartir l’oreille basse : car la boule au ventre n’est pas partie, elle. 

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