mardi 28 avril 2020

Qu'est ce qui ne changera pas le 12 mai ? – Chronique du 29 avril

Bonjour-bonjour

Au lieu de vous demander « Qu’est-ce qu'on fera illico dès que de déconfiné », demandons-nous « Qu’est qu’on continuera de faire comme les jours d’avant, comme si de rien n'était ? »
Vous considérez peut-être que c’est là une question oiseuse, qu’elle consiste à prendre le contrepied de l’opinion, juste pour se rendre intéressant ?
Peut-être – mais peut-être pas, si c’est l’occasion de voir et de comprendre ce qui nous aurait échappé autrement. Et puis, réfléchir à ce qui va à rebrousse-poil des opinions, c’est suivre ce précepte de la sagesse médiévale : « Pour néant pense qui ne contre pense ».
Contre-pensons donc.
1 – D’abord, le 12 mai j’aurai encore peur du virus qui rôdera toujours dans les parages. J’en serai donc toujours à éviter les attroupements et, derrière mon masque, je continuerai de surveiller mes contemporains, des fois qu’ils éternuent un peu trop fort. 
2 – Et puis encore ? Pourquoi renoncer au « farniente vertueux » ? Je veux dire que depuis le 17 mars j’ai accepté l’idée que ne rien faire n’est pas un vice mais une vertu. Rester chez moi, ne pas réaliser les démarches qui nécessiteraient des déplacements et la rencontre de gens éventuellement désagréables, ce n’était pas une lâcheté mais au contraire une manière de me protéger, moi et mon voisinage – vice hier, réserve honorable demain.
3 – Et encore ? Ai-je entamé une introspection qui scrute mon ego profond et qui, de proche en proche, s’est enfoncée loin dans ses racines sans toutefois en arriver aux ultimes radicelles qu’il faudrait encore examiner ? Rappelons-nous Descartes qui ouvre ainsi son Discours de la méthode : « J'étais alors en Allemagne, où l'occasion des guerres qui n'y sont pas encore finies m'avait appelé́ ; … le commencement de l'hiver m'arrêta en un quartier où, ne trouvant aucune conversation qui me divertit, et n'ayant d'ailleurs, par bonheur, aucuns soins ni passions qui me troublassent, je demeurais tout le jour enfermé seul dans un poêle, où j'avais tout le loisir de m'entretenir de mes pensées. » A supposer que  le printemps soit arrivé avant qu'il ait fini d’examiner les racines de la vérité, croyez-vous qu’il se serait déconfiné, qu’il aurait quitté son « poêle » ? Non, il aurait dit que sa retraite n’était pas terminée et qu’il devait la prolonger jusqu’à ce qu’il jugeât qu’il était temps d’en finir.
4 – Et puis, plus simplement, il y a peut-être des habitudes que vous avez eu le temps de contracter, comme l’apéro virtuel relié à vos amis par visio-conférence et que vous souhaitez prolonger au-delà de la lutte anti-covid ? Peut-être ce procédé qui assure une distanciation amicale (je dis bien « amicale » pas « sociale ») rendrait les échanges plus réfléchis, plus pondérés et donc finalement plus authentiques? 

Qu’il faille en passer par là pour toucher à l’authenticité, voilà une leçon qu’il ne faudrait pas oublier, si du moins elle s’était manifestée.

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