- Le festival du cinéma américain de Deauville, présidé par Catherine Deneuve, s'ouvre le 6 septembre avec en avant-première le nouveau Woody Allen, privé de salles aux Etats-Unis après des accusations d'abus sexuel visant le réalisateur. Par ailleurs, le festival a également programmé American Skin, le nouveau film du réalisateur américain de The Birth of a Nation, Nate Parker, acquitté en 2011 du viol d'une étudiante.
- "D'abord Woody Allen et maintenant Nate Parker. C'est juste l'été des agresseurs. Pas d'accord", a tweeté la fondatrice du groupe de pression Women and Hollywood, Melissa Silverstein.
- "Il faut faire la différence entre le cinéaste et la personne", pense au contraire Catherine Deneuve. (Lu ici)
Nous voici devant un dilemme qui dépasse largement les personnes et les circonstances impliquées dans le Festival de Deauville. Car il s’agit de savoir si cette différence entre le créateur et son œuvre existe ou non. Ni plus, ni moins.
Les films de Woody Allen sont-ils contaminés par ses agressions sexuelles (admettons qu’elles soient avérées) ? Idem pour ceux de Roman Polanski, après 40 ans et des appels à oublier l’« affaire » de la part de la victime : sont-ils oui ou non, comme l’affirme son accusatrice féministe imprégnés de la personne du violeur qu’il fut. Oui, mesdames et messieurs : celui qui a réalisé le Pianiste, tout comme celui qui a tourné La rose pourpre du Caire aurait donc laissé dans son œuvre la trace indélébile de ses crimes ignobles. Contre quoi les défenseurs de l’art répondront qu’il faut oublier (après 40 ans…) ; mais ce n’est pas là le problème :
- S’agit-il seulement de faire payer ces hommes pour ce qu’ils ont fait au-delà des pénalités déjà infligées (qu’on se rappelle que Bertrand Cantat, après des années de prison ne peut toujours pas monter sur scène sans appel à le chasser pour l’assassinat de Marie Trintignant) ?
- Ou bien doit-on croire que l’œuvre de l’artiste est partie prenante de son être, et que les souillures ce celui-ci contaminent celle-là.
Pour les philosophes, le cas le plus significatif est celui de Heidegger : son engagement dans l’idéologie nazie a-t-il été pour quelque chose dans sa philosophie (on cite à cette occasion l’importance de l’attachement du dasein au sol qui apparait constamment dans ses ouvrages - en partie dans les Carnets noirs)
Le cas Heidegger pourrait bien servir à blanchir nos cinéastes. Car si l’œuvre du philosophe paraît contaminée (pour autant qu’on l’ait comprise), la chose est bien moins évidente comme on vient de le dire avec Woody Allen ou Roman Polanski.
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