samedi 8 février 2020

« J’avais peur que son “je t’aime” soit moins fort que le mien »

Abdessadek Boumajane, 27 ans, a été condamné à trente ans de prison pour le meurtre de sa compagne, Ninon Kesmedjian, morte sous ses coups à l’âge de 20 ans, en 2016.

Cas typique de crime passionnel ? Féminicide révélant l’horreur des violences faites aux femmes ? Dans les deux cas, exemple de l’importance des mots dans le ressenti d’un drame ? Tout cela est vrai et c’est pour cela que rien ne peut rendre compte de ce qui se passe lorsqu’un être en vient à une fureur telle qu’il se met à massacrer l’autre à coup de tuyau d’aspirateur et de manche à balai (lire ici). C’est que plus rien ne compte alors, plus aucune évaluation, plus aucune supplication, plus aucun souvenir. La bête humaine se déchaine et rien, plus rien ne peut l’arrêter. Ce qui ne veut pas dire que le criminel soit déchargé de sa responsabilité. Avant de ne plus pouvoir s’arrêter, il a bien fallu qu’il consente à démarrer, et c’est là que l’humain doit hésiter à devenir une bête.
On l’oublie souvent, mais la liberté peut parfaitement s’accommoder de la servitude consentie. Non pas que celle-ci soit moins contraignante, moins « dénaturante » que celle qui est imposée, mais parce qu’on peut – on doit – se reconnaitre dans cette folie. Oui, la folie peut être subie, mais elle peut aussi être choisie. C’est toute la différence que font les tribunaux entre le criminel responsable qu’on doit juger et l’irresponsable qu’on doit soigner.

Alors, maintenant, sommes-nous certains que Abdessadek Boumajane appartienne à la première catégorie ?
Eh bien quelqu’un qui dit « J’avais peur que son “je t’aime” soit moins fort que le mien » avant d’entrer dans une folie massacrante a bien choisi cet aboutissement : je veux croire que le romantisme ne se développe que sur ce terrain. (Moi aussi je peux bien choisir l’irrationnel !)

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