mardi 25 février 2020

J’aime les photos d’actualité (1) – Avoir des chaussures neuves en 1946

Dans l’Europe ravagée d’après-guerre, avoir une paire de chaussures neuves était l’équivalent de gagner au Loto aujourd’hui. Cet enfant est un orphelin autrichien de 6 ans nommé Werfel qui semble donc n’avoir connu que six années de violences et de guerre. Le cadeau surprise était un don de la Croix Rouge de la Jeunesse Américaine.



J’aime cette photo parce qu’elle dit tout ce qu’elle a à dire en un instant : pas besoin de subtilité de décryptage, mais un contenu important – et émouvant.
Comment ne pas être ému en effet en voyant l’expression de joie et de plaisir sur le visage de cet enfant, alors qu’il serre contre lui des chaussure évidemment tout à fait neuve – et qu’on voit à ses pieds des godillots percés. On devine alors que ses chaussettes ne valent pas mieux ainsi que sa culotte. Toute la spontanéité qui saute aux yeux dans cette image nous met à l’abri du cliché posé, truqué par un photographe en peine de trouver un scoop à photographier. On imagine que le sentiment qui a étreint le photographe et l’a poussé à prendre cette photo est le même que celui que nous éprouvons aujourd’hui en la regardant.
Et en même temps nous sommes en 2020 et nous n’imaginons pas qu’un enfant puisse avoir ce bonheur avec autre chose qu’une console de jeu ou un smartphone. 
Il est temps de regarder cette image comme une révélation de ce que peut être le bonheur pour un être humain : la satisfaction pleine et entière de besoins insatisfaits – bonheur d’autant plus intense que les besoins en question sont plus fondamentaux.
Et puis, tant qu’on y est : réalisons que la même image pourrait être prise aujourd’hui, en 2020, dans un camp de réfugiés – par exemple du côté du Liban. Elle n’a pas besoin d’être « légendée » ni liée explicitement à une circonstance et une époque données : elle est de tous les temps.

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